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COP 21

COP 21 : 5 questions à Marie-Monique Robin

Marie-Monique Robin, une journaliste d'investigation engagée
Dominique Robin
Spécial COP 21
Claire Sejournet
Claire Sejournet
Mis à jour le 25 février 2021
Journaliste d'investigation et réalisatrice, Marie-Monique Robin a réalisé des documentaires très engagés qui pointent du doigt les menaces qui guettent la biodiversité et qui dénoncent la mainmise des grandes multinationales sur le vivant. Un travail d'enquête essentiel pour informer le grand public et le sensibiliser à des enjeux actuels.

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Quelle problématique est la plus urgente à vos yeux pour cette COP21 ?
Si nous voulons vraiment réduire les émissions de gaz à effet de serre mondiales, il faut que les pays industrialisés acceptent d’assumer leur responsabilité historique dans le dérèglement climatique : 95% du CO2 accumulé dans l’atmosphère ont été générés dans les pays du Nord qui doivent donc réduire de manière draconienne leurs émissions. Quand le GIEC recommande de réduire les émissions mondiales de 40 à 70% d’ici 2050, pour qu’elles soient nulles à la fin du siècle, cela veut dire que les pays du Nord doivent diviser les leurs d’au moins 90%, et cela n’est pas possible si on maintient le système économique actuel fondé sur la croissance illimitée du Produit intérieur brut (PIB). Plus on produit, plus on consomme, et plus on émet, donc on ne pourra pas stopper le dérèglement climatique si on ne change pas de modèle économique et de mode vie. Or, le modèle économique dominant ne fait pas partie des négociations de la COP 21, tout comme d’ailleurs le modèle agro-industriel, qui est lié au premier, et qui d’après la CNUCED et l’ONG GRAIN est à l’origine de près de 50% des émissions mondiales de gaz à effet de serre. L’agriculture représente un puissant levier pour lutter contre le réchauffement climatique, à condition qu’on change de modèle en promouvant partout l’agro-écologie et l’agriculture biologique. 
Face à l'urgence climatique, quel pays vous semble avant-gardiste et quel pays vous parait en danger ?
Le Danemark est le pays européen le plus engagé dans la transition énergétique. En 2015, 40% de l’énergie consommée proviennent d’énergies renouvelables, et le gouvernement vise les 100% avant 2050. Les pays les plus affectés par le dérèglement climatique sont ceux qui y ont le moins contribué, comme le Népal qui émet 0,1% des gaz à effet de serre mondiaux, mais est considéré comme le quatrième pays le plus vulnérable en terme d’impact. Pourtant, comme je l’ai montré dans mon film et livre Sacrée croissance !, le gouvernement népalais a lancé un programme exemplaire pour promouvoir les énergies renouvelables y compris aux fins fonds de l’Himalaya. D’une manière générale, les pays asiatiques comme le Bengladesh, ou africains, comme le Malawi ou le Kenya, souffrent déjà énormément du changement climatique qui menace la production alimentaire et à terme poussera à l’exil des centaines de millions de personnes.
Quels sont les choix citoyens qui permettraient de sauver la planète ? 
Il faut que chacun prenne conscience, notamment dans les pays du Nord, qu’on ne peut pas continuer à vivre comme si de rien n’était. Mon film et livre Sacrée croissance ! montrent que partout, du Nord au Sud de la planète, des citoyens et citoyennes ont compris que chacun peut faire sa part, ici et maintenant, en relocalisant la production et consommation des aliments, en recyclant les déchets, en réparant et partageant les  appareils domestiques, les voitures, en réduisant sa consommation énergétique, en sortant de la logique dévastatrice du « toujours plus ! » pour adopter celle du « toujours mieux ». La bonne nouvelle c’est que tous ceux et celles qui s’engagent dans des mouvements comme celui de l’agriculture urbaine, des coopératives énergétiques ou des monnaies locales vont beaucoup mieux qu’avant ! Toutes et tous disent qu’ils ou elles ont retrouvé un sens à leur vie. Alors qu’est ce qu’on attend pour suivre l’exemple de ceux que j’appelle les « lanceurs d’avenir » ?
Quel peut être l'engagement féminin pour le climat ?
Lors de mon tournage de Sacrée croissance ! qui montre des initiatives abouties dessinant la voie vers une société plus durable, décarbonée, plus juste et plus solidaire, j’ai constaté  que les femmes jouaient un rôle capital. J’ai donc décidé de réaliser en même temps un second film, intitulé Femmes pour la planète qui raconte les mêmes histoires que Sacrée croissance !, mais le récit est porté par les femmes. 
Ces femmes , qui sont souvent mères de familles, ont une conscience aigüe des dangers qui menacent leurs enfants et petits enfants, et à terme la survie de l’humanité.   Elles ont donc décidé d’agir là où elles vivent. Ce sont généralement les chevilles ouvrières, discrètes mais efficaces, des initiatives de transition. Dans mon prochain film  Ungersheim, un village en transition , qui raconte l’histoire d’une commune alsacienne exemplaire, j’ai constaté aussi que les femmes constituaient des piliers, permettant aux initiatives d’aboutir et de s’inscrire dans la durée. J’en profite pour dire que je n’ai pas encore bouclé le budget de ce film, qui sortira au printemps, et qu’on peut le soutenir à ce lien : http://www.m2rfilms.com/crbst_8.html
Quel peut être l'impact du Tribunal sur Monsanto pour cette multinationale et plus globalement pour le droit ?
Le tribunal Monsanto, dont je suis la marraine, a été créé par des personnalités internationales, comme Olivier de Schutter, l’ex-rapporteur spécial des Nations Unies pour le droit à l’alimentation, l’Indienne Vandana Shiva ou l’avocate et ex-ministre Corinne Lepage, ainsi que de nombreuses organisations de la société civile. Ce sera un vrai procès avec de vrais juges et de vrais avocats dont le but est de juger les crimes perpétrés par la multinationale américaine dans le domaine de l’environnement et la santé. Ce procès aura une valeur d’exemple, car bien sûr Monsanto n’est pas la seule firme qui menace la sûreté de la planète et de ses habitants. Son but est aussi de contribuer à la définition d’une nouvelle figure pénale, dont nous avons besoin de toute urgence : le crime d’écocide qui seul permettra de poursuivre au pénal les dirigeants d’entreprises coupables de polluer l’environnement ou de contribuer au réchauffement climatique. 
Toutes les infos sur le Tribunal sur Monsanto 

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