Cet article a été publié dans le magazine Fémininbio #14 Décembre 2017-Janvier 2018
Le chocolat, c’est entre 300 et 800 molécules actives", annonce d’emblée le Dr Franck Senninger, auteur du livre Les vertus du chocolat (éditions Jouvence). Un cocktail chimique donc, qui a de multiples effets sur l’organisme. On connaît ainsi deux tropismes à cet aliment chouchou : le cerveau et le système cardiaque. Autrement dit, il agit sur ces deux aspects de notre santé.
Précisons tout de suite un point important : de quoi parle-t-on quand on mentionne du "chocolat bon pour la santé" ? "C’est toute la question !, souligne le Dr Senninger. D’où ma large fourchette concernant les molécules actives : plus le chocolat est de bonne qualité, plus il en compte." En fait, plus que de chocolat, c’est de cacao dont il est question : "C’est lui qui possède des vertus nutritionnelles intéressantes. Le chocolat est une transformation de cette matière première." Or, le cacao est un ingrédient très fragile. Plus il est transformé, moins il est intéressant d’un point de vue santé.
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Exit donc le chocolat blanc, fabriqué à partir de beurre de cacao. Et quitte à choisir, on prend la tablette la plus noire possible, car elle sera plus riche en cacao. On peut aussi opter pour le chocolat cru : "La torréfaction est l’étape qui fait perdre aux fèves de cacao la plus grande partie de leurs nutriments, pointe Frédéric Marr, fondateur de Rrraw, une chocolaterie 100 % crue. Le chocolat cru ne passe pas par cette étape ; les études montrent ainsi qu’il possède quatre fois plus d’antioxydants que le chocolat conventionnel." Il existe peu d’études sur les qualités nutritionnelles de ce type de chocolat, néanmoins "il paraît assez évident que les autres micronutriments sont aussi présents en plus forte quantité dans le chocolat cru", s’avance Frédéric Marr.
Faut-il manger du chocolat avant d’aller dormir ?
Le chocolat a la particularité d’avoir à la fois un effet calmant et dynamisant. On y trouve de la théobromine, un alcaloïde qui calme tout en augmentant les réflexes. "C’est un inhibiteur de fatigue, explique Frédéric Marr, il n’a donc pas le même effet que la caféine, qui booste." Mais comme le chocolat contient aussi cette molécule, en manger n’aura pas le même effet sur tout le monde. On déconseille ainsi aux personnes sensibles à la caféine de croquer dans un carré après le dîner. Les autres seront sensibles à la théobromine et s’accorder une petite douceur chocolatée en fin de journée leur sera plutôt bénéfique pour aller rejoindre les bras de Morphée.
De même, le salsolinol, un neurostimulant présent dans le chocolat, renforce l’effet boostant de la théobromine. "On trouve aussi de l’anandamide, prévient le Dr Senninger. C’est une molécule qui a des similitudes chimiques avec le cannabis." Pas d'inquiétude, il faudrait en consommer 30 kg en une fois pour retrouver l’effet d’un joint !
Cocktail explosif : phényléthylamine, octopamine, endorphines et dopamine
L’hormone euphorisante du chocolat, c’est la phényléthylamine, comme aime la présenter Frédéric Marr. "Les dépressifs sont carencés en cette hormone, précise-t-il. À l’inverse, les amoureux ou les personnes qui viennent d’avoir un coup de foudre en surproduisent !" Le chocolat contient aussi de l’octopamine, l’hormone qui aide à s’adapter au stress, et de la dopamine, la molécule de l’addiction et de la récompense. C’est donc un concentré de molécules agréables pour l’organisme : "Manger du chocolat entraîne souvent la fabrication d’endorphines (morphine que le corps est capable de synthétiser) et de dopamine par l'organisme", explique le spécialiste.
On comprend pourquoi il existe des accros au chocolat : sans aller jusqu’à des symptômes aussi graves que dans les cas de dépendances aux drogues, il a été remarqué que certaines personnes ne sont pas bien si elles n’ont pas leur dose de chocolat quotidienne. "Cela explique aussi pourquoi certains arrivent à manger une tablette sans être malade, ajoute le Dr Senninger. À cause de l’effet d’accoutumance, ils ont besoin d’un plus grand apport pour retrouver une sensation de bien-être."
Mieux vaut toutefois être raisonnable : pour les amateurs de chocolat, le Dr Senninger recommande de se limiter à un carré après chaque repas. "On me dit souvent que c’est difficile de s’arrêter à un carré quand on aime le chocolat, c’est pourquoi je laisse une marge. Idéalement, il ne faut quand même pas dépasser trois carrés par jour." C’est aussi une question de mathématiques : "Un carré, c’est une cinquantaine de calories, donc dix carrés, ça fait 500 calories… il y a un moment où les effets négatifs prendront le dessus !"
"Quand on parle des vertus du chocolat, il ne faut pas oublier qu’il n’est pas composé uniquement de cacao, rappelle Frédéric Marr. Bien souvent, on trouve aussi du sucre, des produits laitiers et de la lécithine". Choisir de bons chocolats, c’est donc privilégier ceux qui contiennent peu d’ingrédients, et les moins raffinés possible. "À la place du sucre cristal, je privilégie le sucre intégral, le sirop d’agave, le miel ou le sucre de coco", explicite ainsi le chocolatier.
Un super antioxydant et hypotenseur
Néanmoins, rassurez-vous, ce n’est pas le chocolat qui bouchera vos artères. "On dit que le chocolat n’a pas d’effet sur le cholestérol, note le Dr Senninger. En fait, c’est un peu plus subtil. Le problème n’est pas la graisse en soi, c’est que le cholestérol est une molécule qui s’oxyde facilement. Or, cette oxydation cristallise les molécules, qui finissent par boucher les artères. Grâce à ses vitamines et minéraux antioxydants, le chocolat peut aider à diminuer l’oxydation dans le sang."
Le chocolat contient en effet de nombreuses vitamines (B3 et C, par exemple) et des minéraux, comme le manganèse, le magnésium, le potassium, le sélénium et le cuivre. On compte aussi des flavonoïdes, des substances très antioxydantes que l’on retrouve dans les anthocyanes, ces molécules qui donnent leur couleur violet-noir aux végétaux (mûres, aubergines, cassis, etc.). Par réactions chimiques diverses, tous ces éléments agissent comme de puissants antioxydants.
"L’oxydation, c’est le fait pour une molécule de perdre des électrons, précise le Dr Senninger. Les radicaux libres sont des substances qui vont capter des électrons sur les molécules de l’organisme, donc provoquer une oxydation." Or, si les molécules s’oxydent, elles vieillissent beaucoup plus vite. L’effet antioxydant, qui intéresse les amateurs de chocolat, c’est le fait de piéger les radicaux libres pour les empêcher de capter des électrons. "C’est un peu comme si on leur mettait des moufles : ils ne peuvent plus rien attraper", résume finalement le Dr Senninger.
Les vertus du chocolat sont encore nombreuses, comme son effet hypotenseur (il aide à faire baisser la tension), sa capacité à normaliser la glycémie, et donc à réduire le prédiabète, ou son action anti-inflammatoire. Toutes sont dues à la formidable composition du cacao.
Si aucune étude n’a encore été menée pour savoir si le chocolat pouvait soulager certains maux féminins, comme le syndrome prémenstruel ou les manifestations de la préménopause, reste une bonne nouvelle pour les femmes enceintes : sa consommation n’est pas contre-indiquée pendant la grossesse !