Les pères pionniers : derrière chaque grande femme se cache un grand homme

Face à la difficulté de mener une double carrière au sein du couple, c’était, traditionnellement, les femmes qui renonçaient à leur vie professionnelle au profit de leur vie familiale. Cependant, de plus en plus de mères veulent poursuivre une carrière et sollicitent le soutien de leur conjoint. Certains ménages décident alors d’inverser le schéma traditionnel. Ce sont les pères qui prennent en main la gestion de la famille, permettant ainsi à leur partenaire de poursuivre le développement de leur carrière professionnelle.

Dans le cadre de la 8e édition du Forum JUMP (1er avril) à Bruxelles et de la troisième édition à Paris (15 mai), JUMP et Bain&Company ont réalisé une étude auprès de 239 pères et mères à travers 16 pays européens. Voici les principales conclusions de l’enquête :

• La motivation principale : soutenir, à long terme, la carrière de sa partenaire

Sur base des résultats de l’étude, deux raisons principales semblent motiver ce changement des rôles : le soutien de la carrière de la conjointe et l’envie de consacrer plus de temps à leur famille.

L’étude montre aussi que la plupart des ménages ne considèrent pas ce schéma familial comme une solution de rechange ou de dépannage mais plutôt comme une solution durable pour leur famille. En effet, 85% des pères interrogés assument cette responsabilité depuis plus d’un an et près de 40% l’assument depuis plus de 5 ans. Parallèlement, 58% d’entre eux ont l’intention de conserver cette responsabilité pour plus de 3 ans ou indéfiniment.

Cet engagement à long terme se reflète dans la répartition des tâches quotidiennes. Près de deux pères de famille sur trois estiment être le responsable principal des tâches ménagères. Toutefois, les décisions financières et celles concernant l’éducation des enfants sont davantage partagées et concertées dans le couple.

• Quels sont les conséquences de ce choix ?

Les pères pionniers perçoivent deux avantages principaux à leur choix : l’opportunité d’une meilleure carrière pour leur partenaire et le bonheur des enfants. Deux éléments qui rejoignent les raisons de leur choix. Du côté des mères, elles apprécient ces deux éléments tout comme la notion de "repos et moins de stress dans la gestion de la famille". 

De manière globale, plus de la moitié des pères interrogés sont satisfaits de leur situation. Même si 24% d’entre eux éprouvent, parfois, des sentiments mitigés face à leur choix.

• Des obstacles persistent

Malgré les nombreux avantages répercutés sur leur vie de famille, les pères pionniers rencontrent certaines difficultés :

• La contrainte financière est un élément important. Le ménage ne peut pas se permettre autant de dépenses que dans une situation où deux salaires plein temps subviennent aux besoins. L’homme peut aussi avoir des difficultés à accepter sa dépendance financière.
• L’exclusion de la vie (partielle ou totale) active est un autre point d’achoppement à ce modèle familial.  Les pères évoquent leur isolement et un ralentissement de leur vie sociale.
• La pression de l’employeur et les conséquences de leur choix sur leur carrière représentent un frein. Ceci se reflète dans le souhait des pères pionniers d’avoir plus de flexibilité au travail et d’une reconnaissance du rôle parental du père plus élevée, notamment lorsqu’ils travaillent à temps partiel.
• La perception de l’entourage constitue également un obstacle. Les pères de famille interrogés ressentent un soutien relativement modeste de la part de leur famille, leurs amis et leurs collègues de travail.

Les obstacles clés identifiés par les pères sont directement liés à la diminution de leur temps de travail. On remarque que 90% des pères ciblés dans l’étude travaillaient précédemment à plein temps. Suite au choix de prendre plus de responsabilités familiales, 47% d’entre eux travaillent à temps partiel ou sont pères au foyer ; les autres ayant ralenti leur progression de carrière lorsqu’ils restent à temps plein.

• Demandes vis-à-vis de la société

Les ménages interrogés souhaiteraient, avant tout, plus de flexibilité au travail, l’amélioration de services de garde d’enfants ainsi que la reconnaissance et la promotion du rôle parental du père dans la société et les entreprises. Ceci se traduit de trois manières :

• Offrir des options de travail flexible pas seulement aux mères mais aussi aux pères. Ces programmes sont de plus en plus demandés et, selon une étude précédente de Bain&Company, lorsqu’une entreprise ne les propose pas à ses employés, elle génère de l’insatisfaction parmi ses salariés.
• Améliorer la visibilité des pères qui ont choisi plus de flexibilité tout en conservant des postes à responsabilités et des possibilités d’évolution dans leur carrière. Ceci permettrait de faire évoluer les mentalités et la perception de ces programmes.
• Améliorer les services de garde d’enfants et promouvoir le rôle du père, en revoyant par exemple le congé parental, par le gouvernement. 

Cette étude a été présentée le 1^er avril 2014 lors du Forum JUMP à Bruxelles par Evy Hellinckx, senior partner chez Bain&Companydans le cadre de la conférence "Les nouveaux modèles de couple pour soutenir la carrière des femmes" et sera discutée à l'occasion du Forum JUMP à Paris le 15 mai 2014 dans le cadre d’un séminaire pour les acteurs en Ressources Humaines, et fera l’objet d’un débat mettant en lumière les meilleures pratiques des pays européens en matière de gestion de la parentalité.