Quels sont vos parcours de femmes "sans gluten" ?
Marion : J'ai toujours eu mal au ventre, et j'étais constipée. Au moment des règles, j'avais des boutons sur les joues, j'étais très souvent fatiguée voire exténuée et j'étais dépressive. C'est grâce à un bilan énergétique que l'on m'a conseillé d'arrêter le gluten. Je croyais que cette histoire de gluten n'était réservée qu'à des grands malades qu'on appelait malades cœliaques. Je ne pouvais pas imaginer qu'en retirant tous les aliments contenant du gluten, j'allais retrouver un état de santé jamais connu de ma vie ! Depuis, je suis partie en croisade pour porter la bonne nouvelle.
Audrey : Alors que ma petite sœur fut diagnostiquée cœliaque dès sa naissance, je me sentais plutôt bien dans mon corps jusqu’à l’adolescence. Vers 14 ans, j’ai commencé à ressentir celle qu’on appelait en famille "ma douleur" : des crampes terribles qui me prenaient quelques heures après les repas dans tout le tube digestif. J’ai vécu avec jusqu’à mes 22 ans, trouvant toujours une explication douteuse à ces maux chroniques (j’ai trop mangé, j’ai mes règles, etc.). J’ai alors commencé à maigrir dangereusement, en mangeant pourtant avec appétit. Mes parents ont eu la présence d’esprit de me conseiller d’aller voir un gastro-entérologue. Le terrain familial était là. Une prise de sang et une fibroscopie plus tard, le diagnostic tombait : maladie cœliaque. Au régime sans gluten strict, du jour au lendemain, mes douleurs ont cessé.
Quel est le problème avec le gluten ?
Marion : Le gluten est une protéine qui, comme son nom l'indique, colle au niveau de notre intestin. Pour peu que notre flore intestinale, couplée à notre génétique (on peut détecter notre prédisposition à l'intolérance au gluten en faisant une recherche de notre haplotype HLA), soit sensibilisée depuis la naissance, nous risquons à plus ou moins long terme de contracter une maladie auto-immune. Si vous possédez le HLA-DQ2 ou le HLA-DQ8, le gluten risque de créer des malabsorptions intestinales, d'entraîner une perméabilité intestinale et de causer de nombreux désordres digestifs, neurologiques et immunitaires.
Doit-on tous vivre sans gluten ? Est-ce un effet de mode ?
Marion : Oui, oui, oui ! On devrait tous vivre sans gluten si on veut vivre longtemps en bonne santé ! Regardez, à l'échelle de l'humanité nous avons survécu plusieurs millions d'années en étant chasseurs, pêcheurs, cueilleurs. L'agriculture n'a que 12 000 ans, c'est-à-dire 600 générations. Je ne dis pas que l'agriculture est mauvaise, je dis que la monoculture est un désastre pour la planète et pour notre corps. Quelles sont les plantes issues de la monoculture consommées partout dans le monde ? Le blé, le maïs, le soja et, secondairement, les autres céréales comme le riz, l'orge, l'avoine, etc. On veut nous faire croire qu'il faut manger du gluten pour être en bonne santé ! Comme si un Chinois mangeur de viande, de légumes et de riz, et ne mangeant que très peu de blé, ne pouvait survivre sans croissant ! C'est ridicule.
Audrey : Dire que c’est un effet de mode, c’est ignorer tous ceux qui souffrent en silence, de façon chronique, et par le poids de la société, leur interdire inconsciemment de supprimer par eux-mêmes le gluten de leur alimentation. Pour bon nombre de personnes, y compris dans le corps médical, soit on est cœliaque (les produits transformés sans gluten sont même partiellement remboursés par l’assurance maladie) soit on n’a aucun problème avec le gluten. Mais comment peut-on être si manichéen face à la machine si parfaitement complexe qu’est notre corps ? Il est grand temps de nous responsabiliser et de reprendre, chacun, notre santé en main !
Quels maux peut-on éviter/soigner sans gluten ?
Marion : Bien entendu, si vous êtes atteint d'un diabète, d'une thyroïdite d'Hashimoto ou d'un cancer, je ne vais pas vous dire que vous allez guérir ! De nombreux diabétiques ou prédiabétiques ont vu leur taux d'insuline descendre et leur insulinorésistance se remettre d’aplomb, donc ça vaut le coup pour tout le monde. Essayez également de réduire les produits laitiers bovins. Si vous avez de gros problèmes d'inflammation, il est préférable d'éliminer tous les produits laitiers.
Audrey : Il existe beaucoup de maladies, à commencer par le large spectre des maladies auto-immunes, dont les symptômes se trouvent réduits par l’arrêt du gluten (et du lait de vache). On ne guérit pas en arrêtant le gluten, mais on constate que l'on arrive souvent à réduire des douleurs avec lesquelles on s’était habitué à vivre.
Y a-t-il du "mauvais" et du "bon" blé ?
Marion : Tous les blés sont mauvais. Blé, épeautre, kamut : ils affectent tous l'intestin de la même manière. Le blé non bio est souvent contaminé par du glyphosate car les agriculteurs peu scrupuleux arrosent de ce pesticide leur récolte !
Quelles seraient vos recommandations pour des personnes sans pathologies particulières ?
Marion : Je conseille de faire de la prévention, celle-ci passant par l'assiette. La composition idéale d'un repas serait de 3/4 de légumes, bio et de saison de préférence, d'un petit morceau de poisson riche en oméga-3 ou de volaille et, parfois d'un mammifère élevé de façon irréprochable. Prenez l'habitude d'agrémenter vos plats d'épices qui permettent de mieux digérer. Terminez avec une petite quantité de fruits de saison pour éviter que le sucre ne freine la vidange de l'estomac. Privilégiez toujours la cuisson vapeur car elle ne fabrique pas de molécules toxiques. Dernière recommandation : ne mangez que quand vous avez faim.
Vivre sans gluten, c'est difficile ?
Marion : C'est facile mais cela dépend de votre degré de dépendance et d'intoxication. Le blé active nos récepteurs opioïdes, faisant de nous des drogués de la baguette. À partir du moment où vous prenez la décision d'arrêter de consommer du gluten, vous verrez que ce sera plus facile que vous ne le croyiez. Vous pourrez toujours consommer une bonne choucroute de poissons, un bon magret de canard à l'orange, même un cassoulet, bref tous ces plats anciens qui ont fait la gloire de notre gastronomie française et que nos nouvelles générations ont tendance à oublier !
Audrey : Finalement, le plus difficile est d’affronter le regard (et l’incompréhension) de l’entourage, surtout lorsqu’il s’agit d’une décision prise de son plein gré, et non d’un régime forcé, validé par les "autorités médicales". Je pense que les végétariens, ou toute autre personne faisant un choix alimentaire non conventionnel, savent de quoi je parle !
Vos bons conseils et bonnes adresses pour nos lectrices ?
Marion : Le pire repas à changer étant le petit déjeuner, je vous livre un secret... Ma recette préférée : un pot de yaourt de lait de coco dans lequel vous mixez un fruit de saison ou exotique. Ajoutez une cuillère à soupe d'huile de lin ou d'huile de noix bio pressée à froid. Versez dans un bol et ajoutez 3 noix d'Amazonie, pour le sélénium, et des oléagineux de votre choix (noix de macadamia, noisettes, graines de courge, etc.). Si vous voulez une boisson, mixez une cuillère à café de graisse de coco et une cuillère à café de xylitol (c'est un sucre de bouleau qui a un index glycémique bas et ne fermente pas) avec votre café. Une vraie gourmandise !
Audrey : Nous partageons tout dans notre livre Je Mange sans gluten ! En ce qui concerne les restos, à Paris, j’aime beaucoup My Free Kitchen qui propose une cuisine maison très goûteuse, garantie sans lait et sans gluten. Pour les gâteaux, j'aime aller chez Helmut Newcake. Ils font les meilleurs éclairs au chocolat du monde ! Enfin, dernière astuce pour voyager en toute sérénité, j’ai téléchargé l’appli gratuite Gluten Free Restaurant Cards qui explique l’intolérance au gluten et les aliments interdits dans toutes les langues. Simple mais très utile !