La réponse dominante à la crise du Covid-19 a été mécaniste plutôt que sociétale : suspendre la vie sociale en attendant une réponse scientifique. Ce confinement soudain, combiné au discours guerrier des gouvernements, a créé un sentiment de sidération interdisant le rêve, la pensée et l’action. Également, les discours anxiogènes d’effondrement du système - qui nous plongerait dans le chaos, n’ont jamais autant été relayés.
Le retour de l'écoféminisme
L’écoféminisme affirme que le monde industriel dans lequel nous vivons assoit son essor sur l’exploitation de la nature, des femmes, et de nombreuses minorités. Il propose une pensée sociale et environnementale hors cadre, cassant tous les codes de l’actuel système de marché généralisé dont les failles sont devenues des gouffres béants au cours des derniers mois. Ce mouvement fait un retour marqué en France ces dernières années, porté à la fois par la quatrième vague féministe et la montée des préoccupations environnementales. Il propose d’abandonner les modes de pensée qui nous ont amenés jusqu’ici. Il embrasse des approches holistiques positives, promouvant des relations harmonieuses et symbiotiques entre les humains et la nature, dont ils font partie.
Rêver l'obscur : exprimer, imaginer, et créer
Le pouvoir magique de l’écoféminisme est de nous inviter, dans le sillon de l'auteure Starhawk, à rêver l'obscur, procurant ainsi un profond sentiment d'espoir. Il s'agit donc de rêver la fin d'un monde: d’abord exprimer nos blessures, nos peurs, nos colères - nos émotions négatives, puis imaginer un autre monde en puisant dans la joie, la confiance, l’amour - nos émotions positives, et le créer en s’appuyant sur la puissance ainsi générée.
L’expression première est difficile: la peur, comme la colère, sont des émotions qui sont réprimées et dévalorisées. Dans le système de concurrence entre tou•te•s, avoir peur c'est être faible, donc perdant•e•s. Dans un système de pure rationalité, être en colère, c'est ne pas savoir contenir ses émotions, ne pas être raisonnable, et donc ne paraître ni crédible ni légitime. En réprimant constamment nos émotions, nous oublions comment les reconnaître et perdons les mots pour les exprimer. Cela s'apprend en faisant, cultivant en particulier l'esprit du débutant, la patience et le non-jugement. Et on ne pratique que mieux en groupe, souvent au sein de cercles de confiance. Les récits et pratiques écoféministes inspirent de nombreuses initiatives en ce sens.
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Vient alors le temps du rêve, de l'imagination des possibles. En se reconnectant au vivant et au sensible, en faisant confiance à ses sensations, à la connaissance de son propre corps, à son instinct, nous pouvons alors penser le monde autrement, rêver, pour s'offrir puis réaliser des solutions alternatives créatives.
Laisser à chacun•e trouver son chemin
L’injonction est de reprendre le cours normal d’un monde en déclin, mais nombre de personnes sont en demande de sens. Pour cela, les initiatives qui aident à décrypter les évènements récents sont salvatrices, tout comme les groupes de parole, d’entraide, de soutien et d’action.
D'abord éveiller les consciences, donner la parole à celles et ceux qui souffrent, ensemble créer une vision du monde d'après, et mettre en oeuvre les outils pour la réaliser de manière collective. C’est bien là que l’écoféminisme contribuera. Il ne livre pas de solutions toutes faites, il laisse à chacun•e trouver son chemin.
Nos expertes
Wild Wise Witches est une sororité écoféministe qui publie des analyses hebdomadaires et des réflexions quotidiennes. Elle propose des conférences-débats de décryptage de faits sociétaux et des ateliers d’accompagnement.