Le récit de Bougain-ville, Voyage autour du monde, fit découvrir, en 1771, Tahiti, île qu'il surnommait la "Nouvelle Cythère". Il raconta qu’avant même de débarquer, les Français reçurent à bord la visite d’une jeune fille qui "laissa tomber négligemment un pagne qui la couvrait, et parut aux yeux de tous telle Vénus […] : elle en avait la forme céleste". Le mythe de la Vahiné était né ! Aimata, l’une de ces filles du Soleil, allait devenir reine de Tahiti à l'âge de 14 ans, en 1827, sous le nom de Pomare IV, et le rester pendant cinquante ans. Dans sa jeunesse, Amaita se rendait régulièrement sur l'île de Tetiaora pour y suivre des cures d'embellissement, témoignant de l'attention que les Polynésiens portaient déjà à leur beauté.
Le monoï, reine des huiles de beauté
Les fleurs du tiaré, un arbuste de la famille des gardénias, sont le symbole de Tahiti. Leur arôme suave, à la fois fleuri et sucré, est si fragile qu’elles doivent être utilisées dans les heures qui suivent leur cueillette. Elles sont aussitôt mises à macérer dans l'huile de coco ou de coprah, donnant naissance au précieux monoï (littéralement "huile sacrée"), au parfum incomparable.
Réputé dans le monde entier, le monoï protège et répare la peau exposée au soleil. Il est également très apprécié pour protéger, réparer et embellir les cheveux, tout en les parfumant. En Polynésie, on l’emploie aussi pour des massages relaxants appelés "taurumi" ("la santé en bonnes mains").
Un autre rituel consiste à le transformer en pâte de gommage, en le mélangeant avec du sable blanc ou du sable volcanique très fin. Ce soin naturel laisse la peau douce, satinée et parfumée. Il s’oppose aussi aux poils incarnés.
Distinguer coco et coprah
La véritable huile de coco est extraite de l’eau et de la chair de la noix de coco. Elle est supérieure à l'huile de coprah qui est obtenue seulement à partir de la chair séchée. La présence d’huile de coco véritable dans un produit comme le monoï est un gage de haute qualité.
Tamanu et kukui, première et deuxième dauphine
Le tamanu (calophylle inophyle) est l'arbre sacré des Tahitiens, qui emploient son huile parfumée, vert ambré, pour soulager écorchures, irritations, piqûres d'insectes et maladies de peau. Les femmes l’apprécient surtout contre les rides, les vergetures, les jambes lourdes et la couperose. Elles la diluent dans une huile plus neutre, comme celle de macadamia, produite à Hawaï, qui est très fine et bien absorbée.
Le bancoulier, ou noyer des Moluques, est quant à lui l’arbre officiel de l'archipel d'Hawaï. À Tahiti, on l’appelle "tutui". Il porte des noix dont on extrait une huile longtemps réservée à la fabrication de chandelles et de peinture, jusqu'à ce qu’on découvre ses exceptionnelles propriétés cosmétiques. En effet, elle est l’amie des peaux irritées, abîmées et très sèches, qu’elle nourrit, apaise et répare. Appliquée sur la chevelure, elle pénètre parfaitement dans les fibres capillaires. Elle gaine, nourrit et protège les cheveux secs ou abîmés.
Des produits de beauté encore et encore
La flore polynésienne est riche de milliers de plantes médicinales constituant une pharmacopée naturelle appelée "raau tahiti". Parmi elles, plusieurs espèces sont employées pour les soins de beauté, comme le rea tahiti. Il s’agit en fait du nom local du curcuma, dont la tige souterraine (rhizome) est un concentré d’antioxydants et de composés bioactifs. Il est réputé dans de nombreux pays, notamment en Inde, pour embellir le teint et prévenir le vieillissement.
Le zerumbet, ou opuhi (awapuhi hawaïen), appartient à la même famille, celle des Zingibéracées (cousins du gingembre). Son rhizome a lui aussi des vertus médicinales, mais il est également connu en Polynésie, comme à Hawaï, sous le surnom de "ginger shampoo", car ses inflorescences libèrent une sorte de lait qui est employé comme shampooing et après-shampooing.
La canne à sucre entre aussi sous différentes formes dans des recettes de beauté. Par exemple, les parties coriaces de l’écorce sont broyées pour faire des gommages du visage et du corps.
Le marc du café Kona, produit à Hawaï, sert également pour des gommages minceur.
Salade de fruits…
De nombreux fruits exotiques (papaye, ananas, fruit de la passion) contiennent des enzymes exfoliantes, et sont employés en masques purifiants, principalement pour les peaux grasses. Ils aident à éliminer peaux mortes et comédons, mais peuvent irriter les peaux les plus sensibles.
La banane, riche en amidon et en mucilages, est très douce. Sa chair mixée, appliquée en masque, nourrit les peaux sèches et apaise les peaux irritées. Elle gaine et répare les cheveux abîmés par l’océan et le soleil.
Mais la star locale incontestée reste le noni, réputé soulager nombre de maladies de peau (acné, démangeaisons, mycoses), tonifier les cuirs chevelus secs et atones et combattre les pellicules. Ce petit fruit apparenté au grain de café est en effet riche en antioxydants, en vitamine C, et en actifs anti-inflammatoires et antimicrobiens. Une recette traditionnelle consiste à appliquer simplement du jus frais de noni sur la zone concernée, puis à laisser agir pendant 15 minutes avant de rincer.
Parfums des îles
Les îles paradisiaques de Polynésie sont le berceau de parfums capiteux, aphrodisiaques selon Gauguin : tiaré, bien sûr, mais aussi fleurs de vanille, gardénia, moto'i (ylang-ylang), pitate (jasmin), pua (kaupe des îles Marquises), fara (fleurs de pandanus) et tipani (frangipanier)...
Ainsi, aux Marquises, les femmes produisent une huile de coco parfumée de fleurs macérées et appelée "huile de pani", qui sert aujourd’hui aux massages. Elles confectionnent également une couronne aromatique faite des mêmes fleurs, dont les effluves sont reconnus comme un véritable "philtre d'amour".
En bref, les secrets de beauté des îles, ce sont tous les plaisirs des sens réunis !