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Interview

A 16 ans, Violette Dorange traverse le détroit de Gilbraltar à la voile

Voileuse passionnée, Violette Dorange aime la liberté que lui procure son sport
Noura Doukhi
Noura Doukhi
Mis à jour le 25 février 2021
A 15 ans, Violette Dorange, jeune Rochelaise, s'est lancée le défi de traverser la Manche à bord de son Optimist Erplast. Un an plus tard, elle se fixe un nouveau pari : traverser le détroit de Gibraltar. Elle devient la plus jeune femme à traverser le détroit de Gibraltar en Optimist en un temps record de 5 heures et 27 minutes. En plus de ses exploits, Violette s'intéresse à la sophrologie et à la psychologie positive. Rencontre avec cette jeune femme débordante de vie.

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Pour commencer, comment vous est venue la passion de la voile ?

Dans ma famille, nous sommes tous des voileux. Mon père faisait de la voile quand il était jeune et alors même qu’il habitait à Paris, il fabriquait déjà sa planche à voile. Il s’est ensuite installé au Poitou Charentes et il nous a dit : « On est au bord de la mer, il faut que vous fassiez un sport d’équipe ». Mon frère a été le premier à faire de la planche à voile puis ma sœur y est allée. Moi, j’étais la toute dernière de la famille, j’y étais un peu obligée mais c’est devenu une véritable passion.

Et l’idée de vous lancer dans la traversée de la Manche ?

Un soir, je rentrai de l’entraînement en voiture avec mon frère et mon père et on discutait de nos aspirations. Je leur ai dit : « Moi, quand je serai grande, je ferai quelque chose d’incroyable, je réaliserai un projet extraordinaire, comme par exemple la traversée de l’Atlantique ou une grande régate comme le Vendée Globe ». Et puis on s’est demandés pourquoi je ne ferais pas de projet à mon âge, pourquoi il fallait absolument attendre que je grandisse. On a commencé à réfléchir à ce qu’on pouvait faire et puis on est tombés sur la traversée de la Manche en Optimist [Voilier solitaire de petite taille - NDLR]. C’était le projet parfait à monter parce que ça n’avait encore jamais été fait. Cela faisait 8 ans que je pratiquais la voile en Optimist, c’était ma dernière année donc c’était aussi une bonne façon de lui dire au revoir. Mon père m’a toujours promis qu’il me suivrait dans tous mes projets, il m’a donc aidée à monter celui-ci, et petit à petit j’en ai parlé à des gens autour de moi. Mon sponsor Erplast m’a fait confiance dès le début, et avec tous mes soutiens, nous avons formé une équipe pour mener à bien ce projet.

Aviez-vous peur de vous lancer ?

Pas du tout ! J’étais pressée de faire cette traversée, surtout qu’on a mis un an à la préparer. J’avais tellement hâte que le jour vienne, j’en avais marre d’en entendre parler. C’est vrai que quand le jour est arrivé, j’ai eu un peu peur le matin, mais très vite l’excitation a pris le dessus.

Vous étiez seule pendant vos traversées ?

Oui, il y avait un bateau qui était derrière moi et qui m’a suivi pendant toute la traversée, mais j’étais seule sur le bateau.

Quelles difficultés avez-vous rencontrées ?

J’ai parfois eu peur. Pour ma première traversée, on a dû se réveiller à 2h du matin pour partir à 4h. On dormait sur le bateau qui allait m’accompagner et comme on était sur le port, j'ai été réveillée par les mâts qui claquaient. J’ai eu une énorme boule de stress en me reveillant. Finalement, une fois que j’ai préparé le bateau à 3h du matin et que j’ai enfilé ma combinaison, je pouvais déjà sentir l'aventure, c’était génial. Après, j’ai aussi rencontré des difficultés d’ordre technique. Par exemple, lors de ma traversée de la Manche, j’ai enfourné deux fois [l’avant-plan du bateau se remplit d’eau]. Il y avait aussi des vagues dans tous les sens, la houle du courant, et le vent qui tapait très fort. Je pense que le plus dur était de tenir aussi longtemps [Violette a traversé la Manche en 14h et 56 minutes]. Je voyais la terre au loin mais il me restait 5 heures de traversée et je commençais à être fatiguée et à avoir froid. 



Avez-vous eu des surprises ? 

Pendant la traversée de la Manche, j’ai vu 3 dauphins qui sautaient derrière mon bateau et qui m’ont soulevée. Ça a été un très beau moment. C'était aussi la première fois que je naviguais de nuit, j'ai adoré ca. Et puis le matin, j’ai assisté au lever du soleil sur l’eau. Au même moment, on a croisé le premier cargo de la traversée, un cargo immense. Ce moment était magique, l’image reste gravée dans ma tête. Sur la deuxième traversée, je me souviens aussi avoir vu des dauphins soulever mon bateau, un pur moment de bonheur.

Quelles émotions et sensations vous habitent pendant vos traversées ?

Plein d’émotions et de sensations me traversent. J'ai surtout une sensation de liberté, la liberté de me dire « je vais où je veux ». Le jour du départ, c’est toujours spécial. J'ai cette soif d'aventure, de liberté, et de dépassement de soi. Au final, j’ai ressenti plein de choses, mais que des bonnes émotions.

Vous pratiquez aussi la sophrologie...

Oui, cela fait 8 ans maintenant. C’est la même dame qui m’accompagne depuis tout ce temps. Grâce à elle, j’arrive à gérer mon stress et à m’endormir plus facilement.

Comment vous est venue l’idée de voir une sophrologue ?

C’est parti de ma sœur. Elle était tout le temps première pendant ses compétitions mais elle partait dans un stress total avant l'arrivée, ce qui la faisait passer deuxième à la fin de la manche. Un ami de la famille nous a conseillé la sophrologie pour lutter contre le stress à l'approche des compétition. On a commencé ensemble et on a vu que c’était génial et que ça changeait notre quotidien. J'ai appris à me relaxer et je suis devenue plus apaisée. Depuis, j'ai continué à pratiquer jusqu'à ne plus pouvoir m'en passer, c’est devenu un mode de vie.

Qu’est-ce que vous aimez dans la compétition et quels championnats avez-vous fait ?

Depuis toute petite, j’ai une âme de compétitrice. J’aime relever des défis et me confronter à de nouveaux objectifs. J’ai fait le championnat d’Europe en Optimist et le championnat du monde. Là, je commence ma 3e année en 420 [voilier de type dériveur double NDLR], où ma coéquipière et moi avons été double championnes de France. On a aussi fini 4ème en championnat du monde en Nouvelle Zélande et cet hiver, on retourne en championnat du monde en Chine. Les compétitions m'amènent à voyager et à partager ma passion avec d'autres personnes, c'est une chance immense.

Quels sont vos projets ? 

L’an prochain, j’arrête le 420 et j’aimerais faire de la Mini-Transat [La Mini-Transat se fait sur un petit bateau de 6,50m NDLR]. C’est une compétition de course au large où les navigants partent de La Rrochelle jusqu’aux Canaries il me semble, pour traverser l’Atlantique et arriver aux Antilles. J’espère qu’à la fin de l’été, j’aurai mon petit bateau pour monter ce projet et accomplir la Mini-Transat 2019. Côté études, je ne sais pas trop pour le moment. J’ai plusieurs idées, je pense que je partirai plutôt pour une école d’ingénieur, qui me permettrait de continuer à faire de la voile. Si il y a une chose que je sais, c'est que la voile n'est pas terminée.

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