Retrouvez cette chronique dans le magazine FemininBio #20 décembre-janvier 2018
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Arnaud Riou "en équilibre"
Le 7 août 1974 au petit matin, alors que New-York s’éveille, les passants qui lèvent les yeux au ciel découvrent un homme qui semble voler. Tellement improbable et poétique à la fois. Le jeune funambule marche sur un fil tendu entre les deux tours du Word Trade Center séparées de 43 mètres et hautes chacune de 417 mètres, deux fois la Tour Montparnasse.
Philippe Petit, funambule de l'extrême
En le regardant avec des jumelles les témoins découvrent un détail. Cet homme qui marche sur un fil n’a ni filet ni harnais de protection. Il ri sque sa vie à chaque pas où il cherche l’équilibre. Pour parvenir à cet exploit, Philippe Petit – c’est son nom - s’est entraîné pendant des mois, a élaboré des stratégies d’une grande complexité pour accéder aux tours interdites au public, tendre un fil, monter son matériel.
Ce matin, il risque sa vie et au moins la prison pour son exploit et se fera connaître dans le monde entier comme l’homme qui incarne le courage, le funambule qui défie les limites. Au nom de quoi ? De la liberté, de la poésie et d’une recherche obsessionnelle de l’équilibre.
Car dès que deux points se font face, qu’il s’agisse des tours de Notre Dame, des versants des chutes du Niagara, ou ce matin des Twin towers le jeune funambule cherche à les relier puis à les traverser… En équilibre…
Trouver le pas juste, réajuster son poids, défier la pesanteur, ralentir, accélérer, s’élancer, s’entraîner sans relâche pour que le mouvement soit naturel et détendu. Pour rendre son pas fluide, le funambule en quête d’équilibre s’entraîne au déséquilibre sur des câbles graissés, avec des sabots, sur un pieds, en portant d’une main une valise trop lourde. Par tous les obstacles, retrouver l’équilibre fragile qui le maintient vivant.
Trouver l'équilibre dans le mouvement de la vie
Car c’est bien pour nous sentir vivant que nous compensons, contrebalançons, réajustons, notre poids, nos actions, les directions de nos vies. Lorsque j’ai l’impression de trop courir la France à l’occasion de mes stages, conférences, je ralentis et prends soin de moi. Je rééquilibre. Lorsque j’ai la sensation de trop parler, je me tais, médite.
Je reprends la parole, m’expose davantage sur les réseaux sociaux lorsque j’ai la sensation d’avoir passé trop de temps dans ma grotte. Je réajuste. L’équilibre du silence et de la parole, de la méditation et de l’action, de l’accélération et du ralentissement, de l’abondance et de la sobriété.
Perpétuellement, jour après jour, je rééquilibre mon alimentation, mon budget, mes priorités, ma vie professionnelle et ma vie privée. Je rééquilibre non pas pour trouver une position immobile qui serait l’avènement d’une position statique et mortifère, mais au contraire, je me rééquilibre dans l’extrême, dans l’erreur, dans la fausse note qui porte la vitalité en moi.
Parfois, c’est un petit coup de reins anodin pour me réajuster quand je suis trop ceci ou pas assez cela. Je retrouve mon équilibre dans le fil du courant. Parfois, trop déséquilibré, je suis pris dans l’ornière, telle une branche coincée entre deux pierres qui ne peut plus jouir du courant de la rivière. Dans ce cas, j’ai besoin de tout arrêter, je scrute à l’horizon ma ligne de mire.
Je cherche mon nord, je guette le courant, le mouvement, la vie par tous les moyens. Jusqu’à retrouver l’équilibre fragile. Car l’équilibre est lié au mouvement et le mouvement est lié à la vie. Plus il accélère, plus le cycliste est stable et exposé à la chute.
Entre spiritualité et matérialité
Lorsque j’étais enfant, je regardais vivre mes parents et m’inspirais d’eux. Si différents l’un l’autre. Maman était très lunaire ; en lien avec une spiritualité aussi mystérieuse que mystique. Papa lui était solaire, cartésien, pragmatique. Pour aller de l’un à l’autre, sans me prendre les pieds dans les lacets de mes opposés, je me réajustais, je me rééquilibrais.
Parfois, trop en lien avec les mystères de l’esprit, je plongeais dans la méditation, dans le spiritisme, je dialoguais avec les fantômes, les gardiens invisibles de la terre. J’avais besoin de silence, de sacré, de rituels. Je me nourrissais dans mon mystère et dans ma quête de Dieu. Certains amis me perdaient de vue, me trouvaient trop ésotérique.
Je revenais sur terre alors. Je m’occupais de ma maison, j’allais marcher en forêt. Je bricolais. Je retrouvais les ressources de mon pragmatisme très terrestre.
Le pitch
Nourri de sa propre expérience de chaman, Arnaud Riou livre son premier roman qui explore les champs du masculin et du féminin. À l’approche de la quarantaine, Thomas, son héros, va se découvrir, ouvrir son cœur et trouver sa mission de vie au contact de trois figures féminines : Céline, la femme pragmatique ; Iris, la femme libre et assumée ; Carmen, la femme chamane.
Retrouvez Arnaud Riou avec son premier roman Ce soir la lune était ronde aux éditions Solar