Comment vous êtes-vous engagée dans le commerce équitable ?
Il y a quelques années, j’ai hérité de 3 hectares de terres de la part de mon oncle. J’ai commencé à travailler dans la culture du cacao sur ces terres après mes études d’ingénieur en commerce international. Rapidement, mes voisins, mon entourage, m’ont demandé des conseils en termes de production car ils étaient impressionnés par la manière dont je gérais mon champ : j’ai redonné vie à mon exploitation ! Cela m’a incitée à aller plus loin. En 2004 j’ai participé à la création de coopérative agricole de cacao « ECAM » à Méagui et j’en suis devenue la Présidente du Conseil d’Administration. C’est en 2015 que nous avons obtenu la certification Fairtrade/Max Havelaar. Nous avons été appuyés par un partenaire économique très engagé. Cette certification était nécessaire car nous avions jusque-là des difficultés à vendre et à valoriser notre cacao qui était pourtant de bonne qualité. Avant 2015, les formations que nous recevions en tant que producteurs et productrices étaient axées essentiellement sur les bonnes pratiques agricoles. Les formations proposées par le mouvement Fairtrade/Max Havelaar sont plus variées et nous permettent de travailler sur la bonne gouvernance de la coopérative, sur la diversification des cultures et sur la gestion. Nous avons mis en place plus d’actions sociales et les producteurs et productrices se sentent plus impliqués et sont plus engagés.
Quels sont les points qui sont encore à améliorer ?
Notre coopérative a pu améliorer sa productivité mais aussi ses relations avec les exportateurs pour faire grandir le marché de notre cacao à l’étranger, ce qui n’était pas forcément évident avant. Les autres coopératives de la région n’ont pas toutes la chance de vendre autant leur production de cacao aux conditions du commerce équitable, ce qui reste un vrai problème !
Même si nous avons initié des formations pour les producteurs, nous devons encore les améliorer et les multiplier pour que chacun puisse améliorer sa production et sa qualité, ce qui est indispensable pour améliorer les revenus des planteurs.
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Ce que le commerce équitable a changé dans ma vie ?
Ces 3 dernières années, depuis l’obtention de la certification Fairtrade/Max Havelaar, la dynamique de commerce équitable a permis de faire naître de nombreux projets dans la région, grâce à la prime de développement versées par nos partenaires en plus d’un prix juste pour le cacao. On voit donc naître plus d’actions sociales, des réalisations en infrastructures, des programmes de développement, ainsi qu’une meilleure rémunération des producteurs et plus d’investissement dans du matériel de qualité !
Cela m’a aussi permis de rencontrer d’autres acteurs du commerce équitable, au Conseil d’administration de Fairtrade Africa (réseau de producteurs de commerce équitable en Afrique), par exemple. Nous avons pu ainsi échanger sur nos expériences. Je partage ces informations et découvertes avec les membres d’ECAM afin qu’ils puissent aussi en profiter.
Un message aux consommateurs ?
Parfois, les consommateurs pensent que les entreprises ne rémunèrent pas vraiment mieux les producteurs à qui elles achètent le cacao Fairtrade. C’est pourtant faux. Mais pour qu’il y ait une véritable augmentation des revenus, chacun doit faire sa part : nous, nous vous promettons une bonne qualité de cacao, peu d’intrants et de bonnes pratiques pour un meilleur respect de la terre. C’est au tour des consommateurs de comprendre qui produit ces belles fèves de cacao ! Avec de meilleurs revenus et avec les investissements de la coopérative, nous pouvons améliorer les infrastructures de la région, lutter contre le travail des enfants pour qu’ils aillent à l’école, améliorer l’accessibilité en eau et rénover les plantations vieillissantes pour leurs redonner vie. De meilleurs revenus et des investissements stratégiques permettent d’assurer la continuité de la filière cacao. Alors, quand les gourmands de chocolat achèteront leurs tablettes, on compte sur eux pour qu’ils fassent les bons choix !
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