Fondé voici trente ans par Carlo Petrini, ancien sociologue et critique gastronomique italien, Slow Food s'est développé dans le monde entier, porté par des petits producteurs confrontés à la concurrence des multinationales et aux rendements de l'agriculture intensive. Face à la mondialisation et à l'uniformisation des goûts et des aliments, ce mouvement défend la biodiversité, de la terre à l'assiette. Cet automne, à Turin, le Salon du goût Terra Madre mettait en avant ceux qui militent pour une alimentation "bonne, saine et juste".
Le rendez-vous des gourmets militants
De la via Roma à la piazza Castello, les stands sont pris d'assaut par les milliers de visiteurs qui veulent découvrir les goûts, les saveurs et les parfums de ce qui se fait de mieux dans les terroirs italiens. C'est en effet dans cette zone devenue piétonne pour l'occasion que se sont installées de nombreuses "Sentinelles Slow Food de la Péninsule". Derrière ce nom, qui évoque à la fois la veille et la protection, des projets qui se développent dans le monde entier avec le soutien du mouvement, pour favoriser la protection et le développement d'activités autour de variétés locales en danger de disparition, mais aussi de techniques de culture ou de transformation traditionnelles à préserver et à redynamiser.
En un instant, on passe des Abruzzes à la Campanie, puis de la Calabre à la Sicile. Les stands, qui se suivent et ne se ressemblent pas, dévoilent les trésors des terroirs italiens. Les artisans présents, hommes et femmes passionnés, sont heureux de raconter l'histoire de ces aliments qu'ils chérissent au quotidien. Leur attitude est frappante : ils sont à la fois humbles face à la richesse de la biodiversité que la nature nous offre, et fiers de participer à la protéger.
Une mobilisation planétaire et locale
La prise de conscience est planétaire. Aujourd'hui, le mouvement Slow Food est présent dans plus de 160 pays où les acteurs locaux se mobilisent pour sauver les richesses de leur territoire à travers plus de 400 projets "Sentinelles". Dans les jardins du Castello del Valentino, le monde entier est invité à la fête de l'écogastronomie. Des plaines d'Europe aux rizières d'Asie, des montagnes d'Amérique du Sud aux plateaux d'Afrique, les goûts, les couleurs et les textures des mets proposés mettent l'eau à la bouche et rassurent : oui, il est encore temps de se battre pour la planète et pour protéger sa biodiversité.
"Aimer la Terre", thème de l'édition 2016 du Salon du goût, est un acte résolument militant mais aussi terriblement personnel : la découverte d'une nouvelle saveur est une joie indescriptible pour les papilles. Slow Food convainc en appuyant là où ça fait du bien : le plaisir de bien manger, qui passe par une éducation au goût et une stimulation de la curiosité. En France, par exemple, 62% des Français ne savent pas citer plus de six variétés de pommes... alors que l'Hexagone en abrite plusieurs centaines !
Il est temps de sortir des terrains battus et de délaisser les variétés les plus consommées (Golden, Gala/Royal Gala, Granny Smith et Pink Lady®) pour découvrir la Belle Fille de Salins (Jura), la Gros Locard (Sarthe) ou encore la Transparente de Bois Guillaume (Normandie). La biodiversité n'est pas un concept abstrait, c'est une réalité tangible que l'on peut vivre à la première personne. Si, pour la protéger, on doit se faire plaisir, pourquoi s'en priver?
En France, le mouvement Slow Food est présent à travers une trentaine de "conviviums". Retrouvez le groupe le plus proche de chez vous !