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Portrait d'Ouganda

D'enfant blessée, elle devient une femme battante avec "Change a Life Bwindi"

Tina aide l'accès des enfants à l'éducation des enfants en Ouganda avec "Change a Life Bwindi"
Karine Welter
Karine Welter
Mis à jour le 25 février 2021
Au sein de son association "Change a Life Bwindi", Tina se bat d’arrache pieds pour aider les femmes de la communauté de Bwindi à devenir autonomes, grâce à un meilleur accès à l’éducation. Sa ténacité et son courage viennent de loin, très loin… Sans doute de l’enfance.

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La vie de Tina a basculé à l’âge de sept ans, quand elle a dû quitter son village, au sud-ouest de l’Ouganda, près de la forêt de Bwindi. La forêt impénétrable de Bwindi : ce nom, bien connu des amoureux de primates, est un sanctuaire pour les gorilles des montagnes, qui y vivent protégés du braconnage. Mais c’est aussi l’une des régions les plus déshéritées de l’Ouganda. Il y a vingt ans, la famille de Tina n’échappe pas à la règle. Il est difficile d’élever les huit enfants, impossible de les envoyer tous à l’école. Les parents de Tina décident finalement de "placer" la petite dans une famille en ville, moyennant un peu d’argent. Et la vie de l’enfant tourne rapidement au drame, façon Cosette des temps modernes. "J’ai manqué de soins, j’ai manqué d’amour, j’ai manqué de cadres", résume aujourd’hui la jeune femme. Elle n’en dira pas plus.

Le scandale des orphelinats en Ouganda

Le cas de Tina est loin d’être isolé en Ouganda, où de nombreux enfants grandissent séparés de leurs parents, dans des "familles d’adoption", voire même dans des orphelinats.  Le quotidien anglais The Guardian a récemment mis en lumière le scandale des orphelinats ougandais, "l’un des plus rentables" du pays selon le journal. Avec un modèle économique simple : petite rente mensuelle des familles et, surtout, subsides versés par des ONG et donateurs étrangers trop naïfs. Et rien ou presque pour enfants, cela va sans dire.

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"Mon rêve est que les familles ougandaises n’aient plus jamais besoin d’envoyer leurs enfants en orphelinat, martèle Tina. Mon rêve est que les familles soient capables d’éduquer leurs enfants, sans aide ni assistance. Et je sais que cela passe d’abord par l’éducation des femmes." Car si elle a vécu une enfance rude, Tina a eu la chance d’aller à l’école. Ce fut sa bouée de sauvetage, ce fut sa porte de sortie. Elle y a appris à lire, écrire, parler anglais et quelques bases de gestion et comptabilité. Elle y a surtout acquis la conviction que l’éducation peut changer la donne. Résultat : elle se bat aujourd’hui pour que les jeunes filles de sa communauté, à Bwindi, puissent accéder à l’école, sans partir en ville, sans vivre l’enfer de l’orphelinat.

90% des femmes sans accès à l’éducation

Tina a créé l’association Change a Life Bwindi en 2014, juste après son retour au village, après vingt ans passés en ville, après quelques déboires et quelques errances. Revenue au village, elle a repris goût à la vie. Et s’engager est apparu comme une évidence, pour éviter que les enfants aient à subir le même sort qu’elle, pour amener les familles à se prendre en main, "90% des femmes que j’accueille à l’association n’ont reçu aucune éducation, explique Tina. Or, seules les femmes ont le pouvoir de prendre le destin de la famille en mains. Leur permettre de s’émanciper, c’est leur donner le pouvoir de mieux éduquer les enfants."
Les locaux de Change a Life Bwindi sont situés à l’entrée de la forêt impénétrable de Bwindi. Une dizaine de femmes – de toutes ethnies, Bakiga, pygmées… – sont assises et tressent des paniers d’herbes sèches. Quelques hommes sont aux machines à coudre, d’autres reviennent des ruches. Miel, paniers et habits sont vendus dans la boutiques, aux touristes de passage dans le parc de Bwindi.

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Les gorilles sont la clé. Il faut les protéger

Créé au début des années 90, le parc de Bwindi abrite aujourd’hui quelque 500 gorilles des montagnes. Les braconniers ont (presque) disparu et le parc constitue aujourd’hui l’un des plus grands attraits touristiques du pays. "Les touristes font entièrement vivre mon association, explique Tina. Je sais tout ce que je dois aux gorilles : protéger les grands singes, c’est faire venir les touristes, c’est permettre à ma communauté de se développer".

En effet, quand les touristes revenus de trek gorilles achètent du miel ou un panier à la boutique de Tina, ils contribuent, sans presque le savoir, à changer la vie des habitants de Ruhija. Grâce à l’association, certaines femmes ont réussi des choses qu’elles pensaient impossible à réaliser : acheter un panneau solaire, construire une maison après un divorce, financer les études des enfants… C’est la fierté de Tina, c’est sa revanche sur la vie. C’est son moteur et son combat.

Pour aider Tina et son association Change a Life Bwindi 
➢ Si vous êtes fan d’Afrique et de primates, venez voir les gorilles des montagnes en Ouganda. C’est moins cher qu’au Rwanda, et vous pourrez passer par Ruhija pour visiter Change a Life Bwindi. En achetant du miel ou des paniers, vous aiderez Tina à développer ses nouveaux projets (micro-finance, programme d’éducation pour les enfants le week-end…)
➢  Tina est à la recherche de nouveaux marchés pour commercialiser ses produits artisanaux. N’hésitez pas à la contacter si vous avez une idée (vente dans une boutique ethnique, déco…) sur sa page Facebook.

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