Elle est un exemple de résilience et de persévérance à tous les égards. Pendant près de quatre ans, Laëtitia a tenté de suivre sa mission de vie, qui était de devenir mère. Mais après treize fausses couches, les médecins lui diasgnostiquent une infertilité, un motif suffisamment convaincant pour entamer les démarches d'une FIV. Entre violences gynécologiques, tabou sur les fausses couches, et don d'ovocytes, la jeune maman se livre sur son expérience, un parcours semé d'embûches à la finalité heureuse.
FemininBio : Vous évoquez dans votre livre le "tabou" des fausses couches. Quel est-il ? Pourquoi un tabou sur un sujet aussi sérieux ?
Laëtitia : Pour ma part, j'en ai parlé de suite, à ma famille, à mes amis, tout le monde savait. C'est lorsque j'ai commencé à en parler sur Internet, et notamment sur Facebook, que j'ai réalisé qu'un grand nombre de femmes n'en parlaient pas, par peur des jugements ou pour éviter de remuer le couteau dans la plaie. Mon témoignage a permis à d'autres de prendre la parole, et tant mieux, car il n'est pas sain de s'enfermer dans ses émotions.
Pourquoi craindre un jugement de la part des autres ?
Peut-être parce que selon le stade de la fausse couche, la perte est plus ou moins amoindrie. Je me souviens en avoir parlé à mon responsable qui m'avait répondu "C'est pas grave, ce n'était pas un bébé mais une cellule. Il y a plus grave dans la vie". Les gens dédramatisent mais c'est très douloureux peu importe le stade de la grossesse ; quand on tombe enceinte, on s'imagine toujours neuf mois après, donc le perdre à trois semaines ou à trois mois reste compliqué. Il s'agit de notre futur enfant.
Vous expliquez dans votre livre avoir connu treize fausses couches. Comment avez-vous trouvé la force de ne pas abandonner ?
Très tôt, j'ai émis le souhait d'être maman, je voulais avoir un enfant avant mes 25 ans (même si ça ne s'est pas passé comme prévu). C'était vital. Et tant que l'on ne me disait pas "tu ne peux pas être maman", je persistais, et mon médecin my encourageait jusqu'à ce que l'on trouve la cause de mon infertilité quatre ans après ma première fausse couche. J'ai arrêté la pilule en février 2014, et ma première fausse couche est survenue en avril. La dernière, en 2017. A la treizième, j'ai fait une hémorragie avec curetage en urgence. J'ai senti que je mettais ma santé en danger, alors nous nous sommes battus avec le médecin qui jusqu'à présent ne voulait pas faire de FIV. En faisant une analyse de globule polaire, nous avons enfin mis une réponse sur le pourquoi de mon infertilité.
>> A lire sur FemininBio Lait maternel, ovocytes et cheveux : ces femmes qui offrent une part d'elles-mêmes
Je ne sais pas où j'ai trouvé cette force, mais j'étais soutenue par mon entourage proche, et j'ai reçu beaucoup de soutien sur Facebook. Le fait de s'exprimer m'a permis de faire le deuil, et le fait d'aider m'a m'aidée aussi.
Vous avez connu un manque d'empathie de la part du corps médical. Qu'est ce que l'on vous a dit ?
Pour ma huitième fausse couche, j'ai fait une échographie avec la remplaçante de ma gynécologue. Elle m'a violemment dit "le coeur est arrêté" d'un ton froid. Là, c'est le monde qui s'écroule. C'est d'un banal pour eux d'annoncer des mauvaises nouvelles, mais ils manquent parfois cruellement d'humanité, et ne proposent aucune aide psychologique.
Lorsque j'ai pris les médicaments pour expulser l'embryon, je suis allée aux urgences, et on m'a laissé dans un couloir pendant cinq heures. On m'interdisait d'aller aux toilettes, j'ai demandé des médicaments pour la douleur, lesquels on m'a refusés, et lorsque le médecin m'a fait mon échographie, il m'a dit "C'est bon c'est presque fini, je ne vois pas pourquoi vous êtes là", c'était très perturbant.
>> A lire sur FemininBio Couple : comment vivre l'infertilité ?
Pour ces examens nous attendons dans des salles proches de celles où les femmes enceintes accouchent, on entend les monitoring, on mélange celles qui vivent les moments de bonheur et celles qui pleurent la perte de leur bébé. Je n'aime pas également le terme de "résidu de fausse couche", qui me paraît inapproprié. Pour eux ce sont des cellules, mais pour nous, ce sont nos bébés.
Vous avez eu recours à un don d'ovocyte, que retenez-vous de cette expérience de vie ?
Pour ma part ce fut facile, car au fur et à mesure des fausses couches, je me faisais à l'idée que j'avais peu de chances d'arriver au bout. Il n'y a pas assez de donneuses en France, alors j'ai fait des devis avec des cliniques espagnoles et tchèques. Celle de la République Tchèque était très accueillante et la communication était fluide : en un mois, ils avaient trouvé une donneuse qui me ressemblait selon eux (basé sur des critères communs comme la taille, le poids, les cheveux, les yeux). Nous sommes partis une semaine, un peu comme en vacances. Ca nous a permis d'être positifs, et ça nous a plutôt bien réussi (rire).
Quel message souhaitez-vous faire passer aux femmes qui hésitent à faire appel à une donneuse ?
Il faut faire le deuil de transmettre ses propres gènes, sinon il y a peut-être un risque d'être détachée de la grossesse, qu'on ait peur de ne pas l'aimer. Néanmoins, il ne faut pas hésiter, car l'enfant reste le nôtre. C'est le même amour que des parents peuvent également ressentir pour un enfant adopté, mais en plus, il a les gènes du papa et on l'a porté au creux de soi.
Et aux personnes qui n'adhèrent pas à cette pratique ?
Qu'il en faut pour tous les goûts (rire) ! Ce n'est pas parce que l'on passe par une FIV que l'enfant ne va pas être normal ou ne pas pas venir de nous. On peut ne pas accepter mais il ne faut pas juger. Et il faut surtout soutenir les personnes qui choisissent la PMA car c'est un acte difficile, avec des procédures lourdes, même si souvent les "PMettes" ne se plaignent pas et sont courageuses.
Laëtitia Rimpault est l'auteure de Mes étoiles et mon futur paru aux éditions St Honoré.
Sa page Facebook : Mes étoiles et mon futur
Son Instagram : Mes étoiles et mon futur.le livre