Le véhicule électrique est-il adapté aux besoins actuels de mobilité ?
87% des trajets quotidiens font moins de 60km. La plupart des véhicules électriques ont déjà une autonomie proche des 100 km. Donc ils sont tout à fait adaptés ! En fait, lorsque l’on remet en cause la voiture électrique, on s’en prend à la potentialité de déplacement, qui est effectivement bien moindre qu’une voiture à essence. Mais est-il préférable d’avoir un véhicule couteau-suisse, qui nous offre la possibilité de faire exceptionnellement un long trajet, ou un véhicule adapté à nos besoins quotidiens, quitte à s’adapter pour les situations exceptionnelles ?
Comment se prépare l’arrivée de la voiture électrique dans notre quotidien ?
Les choses bougent très rapidement. La voiture électrique commence à arriver sur le marché et l’on prévoit 5 à 10% de véhicules électriques d’ici huit ans. La voiture de demain ne sera plus un objet de possession personnelle, mais une part d’un service de mobilité s’intégrant dans un système global de multi-modalité. Et celui-ci est en phase d’expérimentation dans quelques agglomérations européennes. Demain, nous aurons des forfaits mobilité comme on a des forfaits téléphoniques aujourd’hui, et nous pourrons emprunter une voiture en libre-service, un vélo, prendre le bus, le tram ou le train. On pourra aller de Paris à Bordeaux en utilisant les différents modes de transport à notre disposition. Un peu comme dans les films de science-fiction : le héros a rarement son propre véhicule, mais il en trouve toujours un quand il en a besoin.
L’avenir est donc à la multi-modalité…
La multi-modalité, c’est passer d’un mode de transport à un autre pour se rendre d’un point A à un point B. Cela fait donc des siècles que l’homme utilise la multi-modalité ! Autrefois, on passait de la marche à pied au cheval ou à la charrette, aujourd’hui, on passe de la voiture au vélo ou au bus. La multi-modalité est bien connue des usagers. Ce qui change aujourd’hui, c’est la multiplicité des modes de mobilité et le fait qu’ils sont de plus en plus facilement accessibles.
Qu’est-ce que le véhicule électrique changera en ville ?
Il va la rendre de nouveau agréable à vivre ! Aujourd’hui, soyons honnête, les villes sont irrespirables et stressantes à cause de la circulation : les voitures sont nombreuses, bruyantes et polluent. On en parle peu, mais tout cela a un impact considérable sur la santé physique et psychique des gens. Le véhicule électrique répond à cet enjeu sociétal autant qu’environnemental. Non seulement il n’émet pas de CO², mais il est aussi très peu bruyant. Certains le critiquent considérant qu’il est dangereux car silencieux. Mais remettons les choses à leur place ! Ce ne sont pas les véhicules électriques qui sont trop silencieux, ce sont les autres véhicules qui sont trop bruyants !
Y a-t-il déjà des expériences réussies en France ?
Bien-sûr ! Nous avons remis en 2010 le Trophée des villes électro mobiles, et cela a été l’occasion de voir tout ce qui se fait déjà en France. Les exemples sont multiples, mais je vais prendre celui de La Rochelle, ville qui a reçu un Trophée d’honneur pour tout son travail sur la mobilité électrique depuis plus de 15 ans. Il y a des bateaux électriques pour traverser le port, qui sont inclus dans le réseau de transport de la ville, un parc de voitures électriques en libre service, une navette électrique pour se rendre du parking en centre-ville, etc. Et la municipalité a interdit le centre-ville aux véhicules de livraison de plus de 3,5 tonnes. Cela a permis de repenser entièrement le traitement des livraisons, qui est désormais beaucoup plus logique. Un gros camion ne vient plus livrer un tout petit colis dans une rue étroite : à la plateforme de tri, en périphérie de la ville, les colis sont répartis par quartiers, et une camionnette électrique sillonne les rues d’un périmètre restreint pour les livrer.
Le transport de marchandises est donc un enjeu capital de la mobilité de demain…
Oui. Il va falloir le repenser et cela va avoir une influence considérable dans l’évolution de nos sociétés. Ce n’est plus tenable de recevoir des tomates d’Espagne à Lille et de manger des fraises du Nord à Perpignan. Aujourd’hui, quand on mange des fraises, on mange surtout du pétrole. Je pense que l’on va assister dans la prochaine décennie à un « exode urbain », vers les campagnes ou des villes à taille humaine, qui seront quasi autonomes sur le plan alimentaire. Cela coûtera peut-être un peu plus cher de produire localement, et de façon biologique, mais vu les pics qu’atteint le prix du baril de pétrole, le consommateur sera quand même gagnant.
Mais le véhicule électrique pourra-t-il suivre ce retour à la campagne ?
Evidemment ! Tout le monde pense que la voiture électrique ne peut fonctionner qu’en ville. Ce n’est pas vrai du tout ! Je vois au moins trois arguments pour la développer à la campagne. Le premier, c’est que c’est beaucoup plus facile de recharger sa voiture électrique à la campagne : il suffit d’un panneau solaire dans son jardin, et on a une borne ! Deuxièmement, beaucoup de gens sont obligés de faire des grands détours, jusqu’à 20 ou 30 km, pour aller chercher de l’essence. C’est absurde ! Troisièmement, comme les territoires ruraux sont moins bien desservis par les transports en commun que les zones urbaines, les gens ont besoin d’une voiture. Alors mieux vaut qu’elle ne pollue pas ! Et je tiens à souligner que ce n’est pas parce que l’on habite à la campagne que l’on fait forcément plus de 100 km par jour. Donc, encore une fois, la voiture électrique a suffisamment d’autonomie pour être pratique au quotidien.
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