Le titre de votre livre est un brin provoquant. Quel est le message à faire passer aux parents ?
Ce titre semble provoquant au regard des mauvaises habitudes que nous avons prises sous la houlette de la théorie hygiéniste. Mais "trop d’hygiène tue l’hygiène" et force est de constater expérimentalement et empiriquement que plus nos sociétés éloignent les enfants des "microbes" au sens large (vie citadine, vaccinations, antibiotiques en santé et surtout dans l’alimentation, allaitement artificiel, etc…)
Comment expliquez-vous que les parents soient autant préoccupés par la transmission de microbes ?
C’est lié à l’évolution de notre socio culture occidentale. Il ne s’agit bien entendu pas de revenir au temps où les obstétriciens ne se lavaient pas les mains entre deux accouchements, comportement à l’origine des redoutables fièvres puerpérales. Nous sommes néanmoins passés dans l’excès inverse, avec nos habitudes de récurer, nettoyer, passer nos mains sans cesse au gel hydro alcoolique, et j’en passe…
Comment différencier les bonnes et les mauvaises bactéries ?
Les "mauvaises" bactéries sont les pathogènes, qui justifient une lutte sans merci grâce à l’hygiène, la vaccination et l‘antibiothérapie. Les "bonnes" sont toutes les autres, en particulier celles qui habitent sur nos "interfaces" (intestin, peau, muqueuse respiratoire…). Et pour les conserver et les développer, il faut une hygiène de vie qui va dans le bon sens : allaiter son enfant, manger sainement avec des "fibres", rester en contact raisonnable avec la nature, éviter dans la mesure du possible tout ce qui est "industriel" au sens large
Un enfant peut-il attraper une maladie en mettant ses doigts dans sa bouche ?
Oui s’il rencontre une méchante bactérie, s’il a un "terrain" déficient ou une fragilité organique particulière. Non s’il est en bon équilibre avec son environnement et n’est ni dans la carence ni dans l’excès à tous points de vue.
Comment se fait-il que les microbes protègent des allergies et de l'asthme ?
Ils font "barrière" au niveau de nos muqueuses et ils sécrètes de nombreuses substances indispensables à l’acquisition et à la conservation d’une bonne santé. Ce sont les principaux facteurs de prévention de l’hyper perméabilité intestinale à l’origine de "l’inflammation de bas grade" qui cause de nombreuses maladies chroniques (diabète, asthme, autisme, allergie, etc.)
Un environnement poussiéreux (ex : maison de campagne peu fréquentée) peut-il avoir des conséquences sur la santé des enfants ?
Oui. Le fait de vivre de manière chronique au contact des moisissures et des acariens n’est pas sain, même si les conséquences dépendent du terrain de chaque individu. Mais le fait de vivre éloigné de tous stimuli environnementaux (sans animaux domestiques, dans un milieu totalement aseptisé..) a aussi des conséquences néfastes sur la santé. Tout est une question de mesure et de tempérance.
Est-il bon pour un jeune enfant d'être en contact avec des animaux comme les chats ou les chiens ?
Oui. Et même de vivre au contact d’animaux de la ferme, malgré leurs déchets et déjections. L’immunité a un double rôle : la défense contre les pathogènes et la tolérance vis-à-vis de ce qui n’est potentiellement pas nuisible pour l’homme. C’est la raison pour laquelle il faut des microbes et des parasites dans l’environnement pour initier cette tolérance et l’entretenir. Vivre dans une bulle totalement aseptisée n’est jamais bon pour un enfant en bonne santé qui souhaite le rester. Il faut un équilibre entre "trop" et "pas assez".
Pour leur santé, laissez-les se salir
Pierre Popowski
Editions Leduc
17 euros