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Semence

Femmes Semencières, libérer les graines pour protéger la vie

Les femmes produisent la nourriture, ce qui en fait des gardiennes de la vie et de la fertilité de la Terre.
Claire Chanut
Claire-Marie Germain
Claire-Marie Germain
Mis à jour le 25 février 2021
Nous sommes loin de nous douter de l’intérêt et des convoitises que suscite la graine, première étape de notre alimentation. Entre avidité des entreprise et complicité coupable des gouvernements, Claire Chanut, fondatrice des Femmes Semencières, nous raconte son combat pour un libre accès à la semence.

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Directe et naturelle, Claire a les pieds bien ancrés dans le sol. Il le faut lorsqu’on se bat contre des géants. C’est en des mots simples qu’elle nous explique sa lutte, celle d’une femme contre des corporations sans scrupules, celle de milliers de femmes pour la préservation de la vie et des fabuleuses  richesses de la Terre.

Que sont les Femmes Semencières ?
 
Les Femmes Semencières  sont un mouvement que j’ai créé il y a trois ans avec l’aide de mon ami philosophe et agro-écologiste, Pierre Rabhi. Nous informons le public du monopole des grandes entreprises sur la semence, premier maillon de la chaîne alimentaire, et accompagnons des actions concrètes de préservation et de reproduction de la semence vivante, non brevetée et non manipulée.

Vous vous adressez en particulier aux femmes, pourquoi ?
La culture des sols a fait partie du quotidien des femmes pendant des générations, et dans de nombreux pays, elles sont toujours au cœur du processus alimentaire. Les femmes produisent la nourriture, ce qui en fait des gardiennes de la vie et de la fertilité de la Terre. Nous, les femmes, devons rétablir le libre-accès au vivant et mettre un terme à la logique de rendement qui domine la relation de l’Homme à la Nature.

Comment ce projet est-il né ?
 
Quand ma fille est née en 1997, après 5 ans de stérilité, j’étais heureuse. Mais ma joie était contrebalancée par la pensée que, dans le monde, des femmes voyaient leurs enfants mourir de faim. Je voulais agir pour mettre un terme à ce cauchemar. Au cours d’un voyage en Inde, lors duquel j’ai rencontré Deepika Kundaji, je me suis rendu compte que la semence était mise sous séquestre par les lobbies financiers dans le plus grand secret, à la faveur d’accords entre les multinationales et les Etats. L’exploitation de la Terre par les grandes entreprises m’est alors apparue dans toute son ampleur. J’étais effarée. C’est ainsi que j’ai créé le mouvement des Femmes Semencières en 2011.

Comment les firmes semencières exploitent-elles le marché de la semence ?
Lorsqu’on sème une graine, elle en produit des milliers d’autres.Traditionnellement, la semence produite naturellement par la plante était récoltée par les agriculteurs et replantée. Depuis 1970, ce processus naturel qu’est la reproduction végétale est contrôlé par la loi française. Le travail de multiplication et de sélection de la semence appartient désormais exclusivement aux firmes semencières qui disposent de l’équivalent de « droits d’auteurs » sur leurs semences. Chaque semence créée est enregistrée dans un catalogue. C’est un marché juteux pour les entreprises semencières qui obligent ainsi les agriculteurs à racheter des graines chaque année.

Quelles sont les conséquences de cette mainmise sur la semence?
La création de semence dans des laboratoires entraîne toutes sortes de dérives. La biodiversité s’effondre car les plantes ne sont pas adaptées aux sols. Les organismes modifiés chimiquement pour résister aux biocides se banalisent. Par ailleurs, dans les pays en développement, les agriculteurs sont condamnés à s’endetter pour acheter leurs graines. Cela donne lieu à de véritables drames, comme la vague de suicides qui a lieu depuis plusieurs années en Inde.

Que font les Femmes semencières pour changer les choses?
Notre urgence c’est la formation, car le savoir-faire nécessaire à la reproduction des semences est en voie de disparition. Il y a tout un tas de gestes à maîtriser pour éviter que les plantes ne se pollinisent entre elles de façon anarchique. Avec l’interdiction légale de reproduire les semences, ces gestes se perdent. Nous travaillons donc à préserver les techniques traditionnelles de l’oubli, notamment au Sénégal. Mais nous avons également un rôle de communication. La plupart des gens ignorent la situation actuelle des semences, c’est ce qui donne tant de pouvoir aux firmes semencières. En levant le voile sur les agissements de ces entreprises, nous donnons à chacun le pouvoir d’agir.

Pour contribuer au mouvement des Femmes Semencières, rendez-vous sur leur site

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