Quand on s’intéresse au marketing, il est captivant de suivre les efforts de l’industrie laitière pour nous faire consommer des laitages. J’apparente cela à un truisme, une forme de vérité non vérifiée (ou difficilement vérifiable) devenant crédible à force de répétition. L'un des principaux mécanismes de la publicité est sa fonction de satisfaction de la mémoire d’un client, afin de devenir… inoubliable.
On nous rabâche l'histoire sur les produits laitiers, nos amis pour la vie. Les Français consomment 5 fois plus de yaourts qu’en 1996. Dans les années 20, ce même produit était cantonné à sa fonction de probiotique, vendu dans des pots de verre et exclusivement en pharmacie. François 1er aurait été lui aussi soigné d’une infection intestinale par le yaourt.
Le yaourt à forte dose augmente le risque de cancer
Le yaourt est-il un paradoxe, quand on sait que c’est sa dose qui ferait son poison ? Non, il est comme tous les aliments devenus produits de masse pour les seuls mérites d’une industrie. À faible dose, c’est-à-dire occasionnellement, le yaourt préviendrait le diabète de type 2, favoriserait la flore intestinale et protègerait du cancer du côlon. Mais ses détracteurs, refusant les allégations santé basées sur un rythme de 2 ou 3 laitages par jour, lui reprochent des risques de cancers de la prostate et des ovaires, une chute de la vitamine D et une montée des IGF 1 – favorisant la croissance des cellules. Si le yaourt est produit à partir de vaches industrialisées, que l’on ne laisse pas se reposer pendant la gestation, vous ajoutez des œstrogènes présents dans le laitage. Thierry Souccar ajoute même « Parmi les laitages, ce sont les yaourts qui poseraient le plus de problèmes, avec un risque de cancer qui augmente de 60 % chaque fois qu’on consomme un yaourt en plus (125 g). » et le Professeur Walter Willett – École Harvard – ne le contredira pas, en assenant "C’est irresponsable de faire la promotion des laitages".
Le yaourt par plaisir et non par obligation
Tout est une question de mesure. C’est le principe de base pour un consommateur qui souhaiterait changer de comportement, pour faire un peu plus de désobéissance alimentaire. Se prendre en charge, ne plus écouter le chant de sirènes de l’agro pour se recentrer sur ses propres besoins. Un yaourt doit rester, un pansement digestif si vous en éprouvez la nécessité ou un plaisir si vous en éprouvez l’envie, mais jamais une contrainte santé dictée par prescription à raison de 3 fois par jour. Le marché de la santé et de la silhouette ont jeté leurs dévolus sur ce petit breuvage pour vous en faire manger… un peu trop !
Lait et calcium ? N'oublions pas les algues, le chia, les sardines, les amandes...
Parlons du calcium. Premièrement, personne n’est d’accord sur les chiffres concernant le taux optimal de calcium nécessaire au quotidien et deuxièmement, les pays qui ne consomment pas de lait n’ont pas de chiffres alarmants d’ostéoporose, contrairement à nous. Je ne compte plus les anecdotes de personnes, rencontrées lors de mes conférences, n’ayant jamais bu de lait pour raisons médicales, ayant une densitométrie de leurs os à vous rendre jaloux. Et puis, je prendrais au sérieux les messages "santé", quand ils me parleront de tous les calciums… ceux que l’on trouve dans l’algue Kombu (13 fois plus que dans un verre de lait), le chia (7 fois plus), mais aussi dans l’eau minérale calcique, les sardines (avec arêtes), les amandes, les crucifères, le persil et le sésame.
Ribot, Kéfir, Bulgare, les yaourts à l'ancienne
Et puis parlons-nous du yaourt de nos grands-parents, ou plus vieux encore, comme le Bulgare, le Ribot, le Kéfir ou tout simplement le yaourt artisanal ou maison un peu acide ? Il ne contient plus de lactose et rend ce laitage accessible à l’être humain. Pas fous les anciens. Aujourd’hui on s’adapte au goût de tout un chacun et préférons s’incliner qu’éduquer. Vous trouvez les yaourts un peu trop acides ? Qu’à cela ne tienne, l’industriel y ajoutera de la poudre de lait ou de la crème pour le rendre onctueux. En le rendant moins acide, il est amoindri dans sa fonction primaire, certes et de surcroit, il contient de nouveau du… lactose !!
Nous comprenons que le plaisir doit l’emporter avant tout et ne plus subir ce matraquage et cette culpabilité qui repose sur les parents défiant leurs cautions scientifiques. Lors d’une conversation avec Thierry Souccar, il me faisait part de ces chiffres. De 1975 à 2009, il y a eu 47 études se positionnant contre le lait et seulement 24 pour ! En faisant un petit calcul, si l’on souhaitait rééquilibrer les études en faveur du lait, il faudrait alors que 68 études soient pour. Mais depuis 2009 à 2013 : il y a eu encore 5 études contre le lait et seulement 1 pour ! La dernière en date a été réalisée pendant 22 ans sur plus de 96 000 hommes et femmes âgés de 50 ans.
© sources
"Non aux oranges carrées". Éditions Tredaniel. 2009
"VisioFood". Éditions Souccar. 2012
Merci à Thierry Souccar.