Que vous a appris votre enfance à Tahiti ?
Au-delà du fait que c'est une île, c'est surtout le fait d'avoir grandi dehors, au soleil, qui compte. Je pense que les enfants qui grandissent à la campagne ont la même chance d'être plus au contact de la nature, plus manuels, d'avoir un autre rapport avec les gens et le temps. Quand nous rentrions de l'école, mes frères et moi, notre mère nous disait de rester jouer dehors parce que la maison était propre. Forcément, cela influe sur les loisirs que vous avez et qui vous construisent : vous ne pouvez pas vous affaler devant la télévision !
Qu'y a-t-il de très tahitien dans votre personnalité ?
Je me suis rendu compte en arrivant en Métropole que j'ai une nonchalance toute tahitienne. C'est une "coolitude de vie" qui m'amène à intégrer les choses avec beaucoup plus de recul. Je suis amusée d'entendre parler de la "slow life" comme si c'était une tendance. Pour moi, ça fait partie de qui je suis.
Êtes-vous toujours aussi cool après dix-huit années de vie parisienne ?
Oui, car je suis arrivée dans un monde à l'opposé de tout ce que j'avais connu dans ma jeunesse. Ça a été un choc. Pendant quelques années, j'ai été spectatrice de ma vie. Cela m'a conduit à me poser et à faire des choix, j'ai très vite eu beaucoup de discernement par rapport à ce qui m'arrivait. En même temps, je me considère aujourd'hui très parisienne, j'aime beaucoup cette ville et je m'y sens chez moi. En fait, j'ai une double culture !
Qu'est-ce qui vous rappelle instantanément votre île ?
Les odeurs de mon enfance ! Le gardénia et le jasmin sont des odeurs que je rapproche de Tahiti, tout comme celle du feu de jardin, car on en fait beaucoup là-bas. Bien sûr, il y a le goût de la noix de coco, sous toutes ses formes, et le poisson cru, dont on est très friands en Polynésie. Il y a aussi l'humidité, très présente sur place : quand j'arrive là-bas et que la porte de l'avion s'ouvre, elle me saisit immédiatement. Ça peut être lourd, mais moi, ça me fait du bien, et je me sens tout de suite à la maison.
Quel rapport avez-vous avec la mer ?
J'ai grandi dans l'eau. À deux ans, je savais nager. La mer fait partie de notre quotidien, on se retrouve sur la plage même si on ne l'a pas prévu : on y croise ses voisins, on fait un feu sur la plage à la tombée de la nuit, on y va entre amis... En Polynésie, on adore s'installer assis dans l'eau jusqu'à la taille pour discuter pendant des heures. La mer est un élément dans lequel on se sent bien, et on le respecte beaucoup. D'ailleurs, les enfants sont sensibilisés à l'école au respect de la nature et de la mer.
L'état des océans vous préoccupe ?
Beaucoup ! J'ai eu la chance de grandir dans une mer propre et pure, c'est rare. Lorsque j'entends parler des coraux qui meurent, des espèces menacées, ça me touche car c'est l'environnement dans lequel j'ai grandi qui disparaît. Tahiti a beau être à l'autre bout de la planète, elle est reliée au reste du monde et est donc touchée par le réchauffement climatique et la pollution des mers.
Votre prénom signifie "étoile filante" en tahitien. Cela a un sens important pour vous ?
Je me suis rendu compte très tard de sa signification. Petite, je ne me posais pas de questions, il y avait d'autres Mareva. C'est en arrivant en Métropole, quand on m'a demandé ce que ça signifiait, que j'ai réalisé son sens. En Polynésie, on considère que le prénom est à la fois un héritage et une destinée que l'on donne à son enfant. C'est important et on le choisit avec soin. Pour ma part, j'ai tenu à donner un prénom tahitien à ma fille, ça fait partie de ma culture.
Vous parlez la langue de votre île ?
Très mal ! Lorsque ma grand-mère et ma mère me parlent tahitien, je réponds en français. J'avais l'accent tahitien jusqu'à 6 ans, mais je suis allée dans une école où il y avait beaucoup d'enfants de Français de Métropole ; ils se moquaient de mon accent, je l'ai donc perdu très tôt. Je n'en suis pas triste, car je ne suis pas sûre que j'aurais pu faire autant de choses dans ma vie si je l'avais gardé. Néanmoins, c'est une langue intéressante : ce n'est ni un patois, ni un dialecte. C'est une langue à part entière, qui s'apparente au maori de Nouvelle-Zélande.
La culture polynésienne est-elle encore très forte ?
Oui, c'est une culture que l'on respecte et dont on est fiers. En Polynésie, on a bien conscience d'être un grain de sable dans l'univers, mais on veut faire perdurer nos danses, nos chants, nos coutumes et nos traditions. Tahiti est un joyau, un paradis unique au milieu de l'océan Pacifique. C'est une île française, mais nous sommes à 23 heures de vol de Paris, 18 000 km de la France, et nous avons 12 heures de décalage avec la Métropole. Nous n'avons pas l'euro, nous avons notre propre président et notre assemblée. Tout est assez atypique à Tahiti, et ma vie l'est tout autant. Parfois, je me demande comment j'ai fait pour atterrir ici. Jamais je n'avais imaginé vivre à Paris dans mon enfance, c'était même hors de question ! Mais c'était mon destin d'être prise dans un tourbillon qui m'a amenée ici tout en laissant mes racines ancrées à Tahiti.
Vous avez fondé Good Organic Only : vous proposez des jus pressés à froid et des plats 100 % bio et sans gluten. C'était important pour vous de créer une marque 100 % bio ?
Le bio, c'est une façon de vivre. Si je n'avais pas grandi dans la nature, je ne me serais peut-être pas autant battue pour que cette marque soit bio. Et puis, comme Good Organic Only est basé sur des jus crus, pressés à froid, donc sans chauffe ni oxydation, c'était très important pour moi de pouvoir utiliser des produits de qualité. Nous travaillons principalement avec des producteurs bretons, que nous connaissons. Les fruits exotiques viennent d'un peu plus loin. J'aime dire que j'aurais voulu créer la marque avec les fruits et légumes de mon jardin : je tiens à pouvoir tracer l'origine des produits que l'on utilise.
Quelles sont vos sources d'inspiration green ?
Je ne me considère pas comme une militante. Il n'y a pas eu de déclic ou de prise de conscience particulière. Ça fait partie de moi, de ma culture. Finalement, je dirais que Good Organic Only, c'est mon geste militant pour la planète, car le bio a du sens pour soi, pour les autres et pour l'environnement.
Justement, en parlant des autres, quelle "bio-maman" êtes-vous ?
Je consomme bio autant que possible, et d'autant plus depuis que je suis maman. J'achète le plus possible bio pour ma fille. Et comme j'aime beaucoup cuisiner, elle n'a jamais mangé un petit pot de sa vie ! Mais là où je me sens le plus "bio-maman", c'est quand je mets ma fille sur mon vélo et que l'on va faire des courses.
Finalement, le bio, chez vous, c'est un art de vivre...
Sans aucun doute, je suis une "bio-hédoniste" : j'y intègre beaucoup les notions de plaisir et de curiosité. J'adore recevoir mon panier surprise du producteur : je découvre de nouveaux fruits et légumes, et je dois cuisiner avec des produits auxquels je ne m'attendais pas. L'automne dernier, j'ai découvert les kakis, je n'en avais jamais mangés.
À Tahiti, je cuisinais beaucoup et j'aimais ça, car ma famille me le rendait bien. Aujourd'hui encore, mes frères sont fans de ma cuisine et toujours prêts à venir dîner à la maison.
Un plat qui représente l'été pour vous ?
Le poisson cru ! En Polynésie on en mange toute l'année. En fait, on mange beaucoup cru car le climat le permet. On n'a pas conscience que c'est aussi très intéressant d'un point de vue nutritionnel ! On mange aussi beaucoup de fruits et de légumes. Je pense qu'il y a un lien évident avec le bio : se nourrir c'est être engagé pour le respect de l'environnement ainsi que de son corps, et c'est vouloir son bien-être et sa santé.
Pour revenir à votre question, à Paris, j'aime préparer du poisson cru l'été : en sashimi, en tartare, en carpaccio... Pour un carpaccio, prenez des lamelles de thon très finement coupées que vous présentez dans un plat, ajoutez un filet d'huile d'olive, de l'ail, du thym et du jus de citron. C'est super bon !
Quelles sont vos boissons préférées pour l'été ?
Chez Good Organic Only, j'ai hâte de retrouver [la carte change au fil des saisons – ndlr] le "Pure blast", à base de graines de chia, de fraises, de pomme et de raisin rouge. Sinon, en toute saison, j'aime les infusions. Je raffole de l'infusion de citronnelle fraîche, j'aime beaucoup celle de thym et, de manière générale, je teste en infusion toutes les herbes que je peux trouver ! Parfois je rajoute du miel, mais jamais de sucre. Et le matin, j'aime me presser un citron et ajouter du gingembre, car j'adore cette épice.
Pour vous, c'est quoi la beauté ?
C'est une douceur intérieure que l'on ressent, une philosophie et un état d'esprit. On la lit dans le regard des gens : une personne épanouie est belle. Je pense que c'est une façon de vivre : chacun définit la manière dont il se trouve beau et construit son équilibre malgré les obligations et les aléas de la vie. J'ai beaucoup d'empathie et de sensibilité, du coup j'aime chercher la beauté chez les gens que je croise dans la rue ; je pense que nous avons tous quelque chose de beau en nous.
Et au quotidien, quelles sont vos astuces beauté ?
J'essaie tout ce que je trouve, bio ou pas, car j'adore ça. Mais en fait, je n'utilise pas beaucoup de cosmétiques, je n'ai même pas de crème pour la nuit ! Pour moi, le seul geste essentiel, c'est le nettoyage de la peau, avec de l'eau micellaire, matin et soir. Au quotidien, je ne passe pas des heures à me préparer, car pour moi, le maquillage est lié au travail.
Faites-vous particulièrement attention à votre ligne ?
Non, car je suis épicurienne et je mange ce que je veux. Mais en même temps oui, dans le sens où je mange en faisant attention à la qualité. Je n'ai pas de privations mais je choisis ce qui est bon pour mon corps. J'ai grandi en me nourrissant de produits sains et naturels, donc c'est normal pour moi de continuer à manger ainsi.
Pour aller plus loin :
Retrouvez Good Organic Only sur Internet :
goodorganiconly.com