Le professeur Siegfried Hekimi et l'un de ses étudiants, Wen Yang, de l’université MacGill de Montréal, ont publié en décembre 2010 dans PLoS Biology les résultats de leurs recherches sur les radicaux libres. Leur conclusion : les antioxydants n’augmenteraient pas la longévité.
Depuis plus de 50 ans, on avait admis que les antioxydants jouent un rôle positif dans la lutte contre le vieillissement. Ils empêchent, ou du moins ralentissent, le processus d’oxydation des molécules chimiques du corps. Ce phénomène libère des radicaux libres qui peuvent à long terme dégrader l’état de nos cellules, qui produisent à leur tour des molécules toxiques. La dynamique s’entretient et s’accélère, entraînant le vieillissement. D’où l’appel aux antioxydants.
En déclarant que les radicaux libres n’ont pas réduit la durée de vie de leurs cobayes, les chercheurs de l’université canadienne remettent donc en cause une des bases importantes de travail de la communauté scientifique. A l’origine, les deux chercheurs voulaient tester l’hypothèse générale du vieillissement. Ils ont donc modifié le génome de vers afin qu’ils produisent plus de radicaux libres qu’un vers normal. Logiquement, ces vers auraient dû mourir rapidement, et avant les vers ordinaires. Mais ce ne fut pas le cas.
Le professeur Hekimi et son étudiant ont ensuite donné des antioxydants aux vers « mutants », pensant rallonger encore leur durée de vie. C’est le contraire qui s’est produit. Les chercheurs alors ont décidé de renouveler l’expérience avec un produit pro-oxydant. L’herbicide utilisé accélérait la production de radicaux libres et aurait donc dû donc réduire la longévité des vers exposés. Nouvelle surprise pour les deux chercheurs : les vers ayant été exposés au produit pro-oxydant vivaient plus longtemps que les autres, restés « natures ».
Marchait-on sur la tête depuis 50 ans ? Rien n’est moins sûr, car les résultats de l’étude doivent être nuancés. En effet, l’étude du Professeur Hekimi porte sur des vers, être vivant à la constitution assez différente de celle de l’être humain. Ils n’ont ni organes ni système nerveux. Il n’est donc pas dit que les être humains réagissent comme les vers face à une forte augmentation de radicaux libres dans leur organisme. Mais pour le chercheur, "ces découvertes remettent en question notre compréhension du rôle des radicaux libres dans le processus de vieillissement".
Il est beaucoup trop tôt pour que les nutritionnistes revoient leurs recommandations. Manger des fruits et légumes frais, sources importantes d’antioxydants, reste donc un geste sain pour l’organisme.