Je me suis bien sûr sentie très concernée par ce que j’ai découvert. Ces images presque insoutenables, les traces de mutilations sur un corps encore jeune d’une femme atteinte d’un cancer du sein. Je me suis sentie à la fois touchée et gênée. J’ai du mal encore aujourd’hui à démêler l’écheveau de mes émotions.
Cette jeune mère australienne d’une trentaine d’année a voulu témoigner de son expérience en exposant les nombreuses marques laissées par sa maladie. En regardant ces photos, je lis toute la souffrance qu’elle a endurée, toutes les décisions qui ont dû être prises au moment de l’annonce du diagnostic et de ses chances de survie. Ce n’est pas de gaité de cœur que l’on se résigne à une double mammectomie plus une hystérectomie... surtout au vue de son jeune âge, mais heureusement déjà maman de 4 enfants.
Beth Whaanga le dit : "Je veux montrer que le corps d’une femme a le droit d’être imparfait", et elle précise que son projet "Under the red dress" a pour mission de sensibiliser et donc jouer la carte de la prévention. Un peu comme les photos de cancer du poumon sur les paquets de cigarette. Il faut parfois choquer et montrer l’horreur pour savoir qu’elle existe.
Nos deux démarches sont très différentes, notre vécu aussi. Finalement, les cicatrices sont à son corps ce que les mots sont à mes récits pour raconter la traversée du cancer du sein. A dire vrai je n’aurais pas voulu tomber sur ces images au moment où on me l’avait diagnostiqué. Je me souviens que j’avais cherché des témoignages encourageants. J’ai eu beaucoup de chances de rencontrer des jeunes femmes qui avaient connu un cancer, et qui avaient reçu le même protocole que celui que l’on me destinait - ablation, chimio, radio et reconstruction 1 an plus tard - et qui non seulement se portaient bien mais avaient retrouvé de jolis seins. Je ne sais pas comment j’aurais réagi si j’avais vu les photos de Beth à ce moment là.
Donc oui, il faut du courage pour s'exposer et se montrer dans sa vulnérabilité nue. Oui, il faut sensibiliser et je respecte ce projet que je ressens comme sincère. En même temps quelque chose me trouble dans cette démarche, peut-être pas assez porteuse d’espoir à mes yeux, peut-être trop dure, peut-être qu’elle me renvoi à quelque chose de morbide ou simplement ce que le sort m’a épargné. Ce corps profondément modifié ne ressemble pas au mien alors même que nous sommes passées par quasiment les mêmes étapes. Et si j’insiste sur cet aspect c’est pour dire à toutes les femmes, oui le crabe est une vraie saloperie mais si vous êtes touchées, sachez qu’au bout vous n’aurez pas forcément le corps le Beth. Chaque histoire est unique, chaque issue aussi et à chacune son roman personnel.
Retrouvez le projet de Beth Whaanga sur internet Under the red dress et sur Facebook Under the Red Dress Project