En 2008, l’ONU annonçait que pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, la population mondiale était majoritairement urbaine. La tendance ne s’est pas inversée depuis. En 2014, l’organisation internationale projetait même que la proportion de la population urbaine devait passer de 54% de la population mondiale à 66% en 2050. Le défi toujours plus grand de l’intégration de ces populations dans le tissu urbain inclut une question fondamentale : comment nourrir tous les habitants des villes ?
Dans son livre Ville affamée (édition Rue de l’Echiquier), Carolyn Steel propose un passionnant parcours à travers les âges afin de dérouler le fil qui relie le citadin à son alimentation. L’organisation spatiale des villes s’est construite en grande partie autour des questions d’approvisionnements alimentaires, comme le rappelle encore aujourd’hui de nombreux noms dans les villes, de la "rue des meuniers" à la "place des halles". Avec la révolution industrielle et l’avènement du train, le citadin s’est définitivement déconnecté des sources d’approvisionnement. Il était désormais possible d’acheminer rapidement des denrées alimentaires des campagnes au centre-ville. C’est ainsi que les villes ont pu connaître un essor considérable, concentrant le savoir, la richesse et les techniques, et qu’elles se sont étalées, grignotant sur les terres arables.
Le grand retour de l’agriculture urbaine
Dès les années 1970, le guerilla gardening nait à Manhattan, porté par un groupe de citadins souhaitant convertir un lotissement abandonné en jardin collectif. Depuis, de nombreuses initiatives sont apparues, qui encouragent le jardinage urbain dans tous les lieux qui s’y prêtent. En 2008, le mouvement des Incredibles Edibles nait à Todmorden en Angleterre, en ajoutant à la dimension de reverdissement des villes la notion d’auto-suffisance alimentaire. En France, le mouvement est connu sous le nom des Incroyables Comestibles, et la visibilité offerte par l’apparition des fondatrices dans le film Demain a renforcé sa notoriété dans l’Hexagone.
A chaque fois, les participants à ces projets de revégétalisation urbaine et de potagers partagés évoquent une solution simple et efficace pour recréer du vivre-ensemble, prendre le temps de se rapprocher de la nature, pratiquer une activité déstressante en extérieur et retrouver le plaisir de manger des produits dont on connait l’origine. Désormais, les potagers urbains se déclinent du rebord de fenêtre à un jardin dans une cour intérieure d’immeuble ou d’hôpital, en passant par les bacs à fleurs municipaux et tout interstice remarqué dans l’asphalte.
C’est à la rencontre des personnes qui s’impliquent dans ces projets que Jennifer Cockrall-King est allée, narrant ses rencontres dans un livre qui se lit comme un carnet de voyage, La révolution de l’agriculture urbaine. Montréal, Chicago, Paris, Londres, mais aussi Détroit, Vancouver, La Havane… les exemples de villes dans lesquelles les habitants s’investissent dans des projets de potagers urbains ne manquent pas. De quoi donner des idées pour cocréer ensemble les nouveaux espaces de vivre-ensemble.
Pour aller plus loin :
La 9ème édition de La bio dans les étoiles se tiendra à Annonay les 6 et 7 avril prochains autour du thème « Potager partout et bio pour tous » : deux jours de débats, de conférences et de rencontres avec des acteurs engagés dans la construction d’un nouveau vivre ensemble.