Qu'est-ce qui vous a amenés à vous lancer à vélo sur les routes du monde ?
Nous avions envie de découvrir le monde de nos propres yeux. De voir, goûter, vivre, expérimenter cet ailleurs que nous ne connaissions pas.
D’un autre côté, nous souhaitions ralentir le rythme de la vie moderne, prendre notre temps, être autonomes, nous lever le matin sans savoir de quoi la journée sera faite, vivre au jour le jour. Nous attendions également de ce voyage qu’il nous fasse sortir de notre zone de confort. Ce qui fut naturellement intensément le cas ! Et parce qu’il offre une liberté inégalée, le voyage à vélo permet tout cela.
Etiez-vous férue de cuisine avant votre voyage ?
Oui, j’ai toujours aimé cuisiner ! C’est d’ailleurs pour cela qu’à la fin de mes études de designer mobilier, j’ai décidé de me spécialiser en design culinaire. Peu après l’obtention de mon diplôme, en préparant notre voyage à vélo, j’ai eu l’idée de Cuisin’situ. J’étais convaincue que l’on pouvait, avec pas grand chose, améliorer notre alimentation en voyage. 2 ans après est né ce livre de cuisine pour aventuriers, le premier développé en situation…
Caroline cuisine sur la plage en Croatie - DR
Qu'est-ce que la cuisine itinérante ?
Il s’agit de la cuisine du quotidien que le voyageur se concocte lui-même durant son aventure. C’est en général une cuisine simple, efficace, basée sur des aliments légers, de bonne conservation et à la cuisson rapide. La cuisine itinérante est également étroitement liée au contexte géographique par l’emploi de produits locaux. L’objectif de mon projet est d’ouvrir le champ des possibles tout en gardant à l’esprit ces contraintes, c’est à dire en proposant des méthodes pour se simplifier la vie et des recettes adaptées ou adaptables à de multiples contextes. D’ailleurs, à propos de ce livre, j’aime plutôt parler de «guide de recettes».
Après une journée de vélo, étiez-vous toujours motivés pour vous préparer des petits plats le soir ?
Plus que jamais ! En voyage à vélo, le corps est mis à rude épreuve. Toutes les émotions sont exacerbées : la joie, la déception, le sommeil mais aussi la faim… Les repas deviennent des moments cruciaux ! Les jours de galère, l’alimentation peut constituer notre seule note agréable de la journée, notre unique réconfort. Nos déjeuners et dîners se doivent donc d’être roboratifs, autant pour le corps que pour l’esprit.
Plus d’un tiers du livre Cuisin’situ est dédié à la question du choix du matériel et des ingrédients de base. C’est à partir du moment où l’on dispose d’une « batterie-popote » robuste et polyvalente que l’on va gagner en temps, en efficacité et en qualité. En fait, en voyage c’est comme à la maison : le travail est facilité dès lors que l’on utilise les bons outils.
Vous avez pratiqué la cueillette sauvage au cours de votre voyage. En étiez-vous déjà familiers ? Quels conseils pouvez-vous partager ?
J’ai appris assez jeune à reconnaitre les champignons sauvages. A l’automne, au début de notre voyage, nous en avons trouvé quelques uns entre la Savoie et le val d’Aoste : des cèpes, pieds de moutons et coulemelles. Les cueillettes de végétaux concernaient le plus souvent des produits très basiques, reconnaissables, et faciles à trouver : pommes, noix, noisettes, châtaignes, grenades, mûres, plantain, orties… Même si l’on est pas experts, il y a presque toujours quelque chose de facilement identifiable à cueillir le long des chemins.
En Asie, il nous est arrivé de trouver des papayes sauvages, de ramasser des noix de coco tombées sur le bord de la route. En Amérique du sud, c’était les avocats sauvages…
Evidemment, il faut toujours garder à l’esprit que l’on ne cueille que ce que l’on a formellement identifié en s’assurant que la zone n’est pas polluée. Et toujours à distance des routes.
Sur la route, au Japon - DR
Votre voyage vous a-t-il amené à porter un autre regard sur l'alimentation occidentale ?
La cuisine de rue en Asie ! En Chine, en Thaïlande, en Malaisie, nous avons découvert la cuisine de rue, la vraie, et nous en gardons un souvenir fabuleux… et le regret qu’il n’en soit pas de même en Occident.
En revanche, ce voyage nous a fait prendre conscience de l’extrême diversité dans le choix de nos menus en France. En effet, en Occident, mais surtout en France, on a facilement accès à toutes les cuisines du monde, on peut changer d’expériences culinaires quand on le souhaite. Sushis, pizza, ceviche, cuisine thaï, indienne, Fish&chips… Il y a de quoi varier en permanence. Nous n’avons vu une telle diversité nulle part ailleurs.
Quel est votre plus beau souvenir culinaire du voyage ? Et le plus mauvais ?
Je crois que mon plus beau souvenir culinaire était une poêlée de cèpes aux piments séchés en Chine. D’une part, parce que, comme d’habitude, on avait commandé ce plat au hasard sur une carte écrite toute en Chinois - et que ce fut une excellente surprise de voir arriver des cèpes plutôt que des pattes de poulet - et d’autre part parce que j’avais rarement mangé quelque chose d’aussi harmonieux dans ma vie !
Le plus mauvais ce devait être un plat de frites froides en Macédoine, parsemé de fromage râpé et servi avec de la mayonnaise…