Originaire du Sud-Est asiatique, depuis la Birmanie jusqu’aux Philippines, cette graminée doit son nom à ses graines en forme de larmes. De grosses larmes quand même, puisqu’elles rivalisent en taille avec un grain de maïs, en plus allongées. Coriaces et revêtues d’une sorte de vernis, elles sont parfaites pour confectionner des colliers, d’où leur surnom d’herbe "à collier" ou "à chapelet". Néanmoins, des variétés à épiderme plus tendre sont cultivées depuis quatre millénaires en Inde, et un peu plus récemment en Chine, sous le nom de ma-yuen. L’arrivée du maïs les a éclipsées dans ces pays, mais pas en Thaïlande ou au Laos, où l’on obtient un rendement avoisinant deux tonnes à l’hectare, sans engrais ni traitements.
Larme de job : céréale aux vertus appaisantes, nutritives et décoratives
Plus proche du maïs que du riz, cette herbe à feuilles larges apprécie la chaleur et produit des panicules dont les épillets s’ouvrent au fur et à mesure de l’élongation de l’ensemble. En souvenir de son origine tropicale, la larme de Job préfère les terres conservant l’humidité en été. Dans de bonnes conditions, elle peut culminer à plus d’un mètre de haut, mais atteint le double dans ses contrées d’origine. En fin de saison, si l’automne est doux, il n’est pas rare de découvrir des graines ayant germé et portant déjà une plantule. Autrefois, la larme de Job était cultivée dans les jardins des monastères pour confectionner des chapelets.
Même chose dans une bonne partie de l’Asie bouddhiste. Dans le Nord de la Thaïlande, on se sert aussi des graines pour décorer les vêtements ou les accessoires. En Afrique, un collier confectionné avec ses graines est réputé atténuer les douleurs qu’accompagne l’apparition des dents chez le bébé. Mais, étant donné les risques d’étranglement, mieux vaut s’en passer. Dans les épiceries asiatiques, vous trouverez des boîtes de graines de larmes de Job, à accommoder en dessert, avec du lait de coco. Ne vous attendez pas à l’extase…
Larme de job : céréale endurante
Un petit mot sur Job. Ce patriarche biblique apparaît aussi dans le Coran, sous le nom d’Ayoub. Il possède tout ce dont on peut rêver : une belle femme pieuse, 14 enfants, des serviteurs par centaines, des champs de blé et d’orge à perte de vue, du bétail et de l’argent. Arrive le cap de la cinquantaine, et Dieu se met à l’éprouver durement, lui retirant toutes ses faveurs. Il est frappé de paralysie, ses terres deviennent stériles, son bétail meurt. Ses enfants disparaissent, un à un. Qu’imaginer de pire ? Va-t-il abandonner sa foi devant tant d’adversité ?
Sur son lit de douleurs, Job continue de louer Yahvé, sans perdre espoir. L’épreuve dure dix-huit ans, jusqu’à ébranler moralement sa femme qui se met en colère. En pleurant, Job implore alors son Seigneur, mais sans rien lui reprocher. L’heure de la délivrance est enfin venue : le Très-Haut fait jaillir l’eau à ses pieds, une eau miraculeuse qui le guérit de son mal. Une pluie d’or restitue sa fortune, et une autre fait jaillir l’orge dans les champs. Sa femme redevient jeune et donne naissance à 26 garçons et filles. Job ou l’endurance au mal récompensée quand elle s’accompagne de la fidélité à ses fondamentaux. Belle métaphore pour l’agriculture, non ?
Envie de découvrir cette céréale ? Vous pouvez vous procurer des larmes de job dans les épiceries asiatiques. N'existe pas en culture bio pour le moment.
Texte extrait du livre "Céréales, la plus grande sage que le monde ait vécue" de Jean-Paul Collabert aux éditions rue de l'échiquier.
Crédit photo : Magellan-bio.fr