Comparé aux autres céréales, le tef est tout en finesse. Cela commence avec les graines, une vraie poussière puisqu’il en faut 2 500 à 3 000 pour obtenir un gramme ! On dit qu’une poignée suffirait à ensemencer un champ entier, si l’on n’en perdait aucune. Avantage : les insectes ne peuvent pas se loger dans de si petites graines. Du semis naissent des touffes gracieuses, un jaillissement de feuilles étroites qui peut monter à plus d’un mètre.
Elles sont appréciées des chevaux, au point que la culture du tef fut pratiquée au xixe siècle en Afrique du Sud dans les fermes boers pour le fourrage. Autre intérêt du tef, sa présence fixe les sols et limite l’érosion. Il peut prospérer dans des sols gorgés d’eau, ce qui peut arriver momentanément sous les tropiques, une performance dont seul le riz est capable parmi les céréales.
Le teff : une céréale naturellement sans gluten
La farine de tef, qui ne comporte pas de gluten, est très riche en protéines et en minéraux, notamment en fer. Cela expliquerait pourquoi l’anémie est rare en Éthiopie, d’autant que le fenugrec, les lentilles et les fèves apportent leur complément d’acides aminés essentiels. On retrouve dans ce mélange la sagesse diététique ancestrale commune à tant de peuples. Le tef rouge est le plus riche en minéraux, notamment en fer. Certains avancent même que la légendaire endurance des coureurs éthiopiens viendrait pour partie du tef… Comme d’habitude avec les céréales, du moins hors pays musulman, il y a toujours une bière locale en vue, ici la tela ou katikala.
Le tef : vers une culture mondiale
Les qualités nutritives du tef devraient lui valoir un avenir radieux, d’autant que de plus en plus de restaurants éthiopiens ouvrent aussi bien à New York qu’à Londres ou à Rome, sans oublier Paris, et l’injera pourrait bien connaître le même engouement que la tortilla. Pour preuve, le parcours de l’Américain Wayne Carlson, fondateur de la Teff Company.
Parti en Éthiopie il y a trente ans pour y étudier les maladies tropicales, il est fasciné de voir le tef occuper une telle place dans les cultures et les repas. Admiratif devant la capacité de travail des paysans, il l’attribue à leur alimentation. Une fois revenu dans l’Idaho, il remarque la ressemblance géologique et climatique entre cet État et les hauts plateaux éthiopiens.
Même basalte omniprésent, mêmes étés chauds et très ensoleillés. Pourquoi ne pas cultiver le tef dans la vallée de la Snake River ? Depuis vingt ans, la société qu’il a créée approvisionne en tef de nombreuses communautés éthiopiennes et érythréennes de la diaspora. Mais il semble mal supporter la concurrence, si l’on en juge par sa condamnation à une année de mise à l’épreuve, suite à l’altercation qui l’a opposé à un Éthiopien émigré au Minnesota et qui souhaitait lui aussi cultiver cette céréale ancestrale.
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Texte extrait du livre "Céréales, la plus grande sage que le monde ait vécue" de Jean-Paul Collabert aux éditions rue de l'échiquier.
Crédit photo : Floratrek.hautetfort.com